Economie

Motorisation de l’Eurodrone : la filiale italienne de General Electric rafle la mise

Le futur drone MALE RPAS européen, l’un des piliers du SCAF où les Allemands ont obtenu le leadership, volera bien grâce à un moteur italo-américain. C'est la confirmation d’un choix à rebours de l’autonomie européenne défendue par Paris.

Avio Aero et Airbus Defence & Space ont signé le 1er septembre un contrat pour la fourniture de 120 moteurs Catalyst 1300-ED1, révèle le site italien Difesa Online.

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Ces moteurs, conçus par la filiale italienne de l’américain General Electric (GE Aviation), propulseront la soixantaine de futurs drones de surveillance européens (MALE RPAS, pour Medium Altitude Long Endurance Remotely Piloted Aircraft System). Un camouflet pour le motoriste français Safran Helicopter Engines, qui avait présenté son Ardiden 3TP.

Cette signature confirme le choix de la filiale allemande d’Airbus, annoncé fin mars. Date qui en elle-même avait interpellé, l’avionneur ayant promis d’attendre la fin des élections françaises avançait La Tribune. Pour l’industriel de Munich, le moteur d’Avio-GE serait tout simplement plus compétitif.

Le Catalyst offre de «meilleures performances économiques» ainsi que «la solution la plus mûre» défendait dans le communiqué Jean-Brice Dumont, directeur des avions militaires chez Airbus Defence & Space, mettant en avant le fait que GE l’a déjà testé et livré à Textron, qui en équipera ses avions d’affaires.

Le spectre de la législation états-unienne

C’est pourtant là où le bât blesse. En effet, les motivations de Paris de développer un drone européen étaient certes de permettre aux industriels du Vieux continent de rattraper leur retard sur leurs concurrents américains et israéliens, mais surtout de s’émanciper de toute dépendance vis-à-vis des Etats-Unis.

Au-delà d’arrêter de recourir aux drones Reaper, il s’agissait de se prémunir des normes ITAR (International Traffic in Arms Regulations). Ces dernières offrent à Washington un droit de regard sur la vente que des pays tiers font de produits incorporant des composants ou des logiciels originaires des Etats-Unis.

Les constructeurs d’armement européens veulent se passer des technologies des Etats-Unis


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Avio Aero assure que son moteur est «ITAR Free». Ligne reprise par Airbus. «le Catalyst est un moteur […] entièrement développé et fabriqué en Europe, conçu pour ne pas être soumis aux règles ITAR, permettant ainsi de s’affranchir d’exigences supplémentaires en matière d’exportation», soulignait ainsi Airbus dans la justification de son choix. Certaines pièces du moteur seront pourtant bel et bien fabriquées aux Etats-Unis. Mais le turbopropulseur d’Avio demeurerait hors d’atteinte du législateur américain : «On s’en est assuré par un audit.», affirmait Jean-Brice Dumont. Une vérité certes mais dans l’état actuel de la réglementation américaine.

Ce point est d’autant plus sensible que le drone MALE RPAS est l’un des sept piliers du SCAF, le Système de combat aérien du futur lancé par Emmanuel Macron et Angela Merkel à l’été 2017. Pilier sur lequel Berlin a obtenu le leadership, la France ayant accepté de céder la direction sur cinq d’entre eux, au grand dam de Dassault.

Le Français, partenaire aux côtés d’Airbus Defence & Space et de l’Italien Leonardo, avait pourtant fait ses preuves en matière de drones. Non seulement ses travaux avec BAE System dans le cadre du projet franco-britannique Telemos ont servi au développement de l’Eurodrone, mais l’industriel tricolore fut également un précurseur grâce au NEURON. Ce drone de combat furtif fit son premier vol en décembre 2012. Soit bien avant celui du drone européen qui n’est pas attendu avant 2026.

Un programme interétatique qui cumule les retards

Depuis son lancement officiel en 2015, le programme a cumulé les retards. Comme pour l’A400M, les pays partenaires s’entendent très difficilement sur l’intégration des spécificités de chacun. Les Allemands exigent notamment deux moteurs, afin de pouvoir utiliser en toute sécurité leurs drones au-dessus de zones urbaines. Option impensable pour les Français qui veulent quant à eux les employer sur des théâtres d’opérations, comme au Sahel.

Par ailleurs la double motorisation augmente, aux yeux de Paris, le coût unitaire et le poids de l’appareil ce qui le rendrait bien moins compétitif sur le marché. Dans un rapport sénatorial publié en juin 2019, l’Eurodrone fut ainsi jugé «obèse» et trop onéreux.

Mais Airbus Aerospace & Defense reste le maître d’œuvre, devant Dassault et Leonardo. Le tout premier exemplaire de ce drone bimoteur de plus de 11 tonnes (deux fois plus qu’un Reaper américain) est attendu pour 2029.




Des sénateurs français inquiets pour l’avenir du futur avion de combat européen


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