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Pouvoir d’achat : l’Assemblée nationale adopte le projet de loi après des débats tendus

Après quatre jours et une nuit entière de discussions houleuses, les députés ont adopté ce 22 juillet en première lecture le projet de loi pour le pouvoir d'achat, un texte censé atténuer les effets de l'inflation et de la crise énergétique.

Au terme de plusieurs jours et une nuit de discussions animées, les députés ont adopté en première lecture, le 22 juillet, le projet de loi pour le pouvoir d’achat, un texte contenant une série de mesures destinées à atténuer les effets de l’inflation et de la crise énergétique. Le premier grand texte de la législature a été ainsi validé peu avant 6 heures du matin par 341 voix pour, 116 contre et 21 abstentions. 

«L’esprit de responsabilité l’a emporté pour protéger nos concitoyens», a réagi le Premier ministre Elisabeth Borne sur Twitter après le vote, se félicitant que l’Assemblée ait réussi à «bâtir des majorités de projets pour apporter des solutions concrètes aux Français».

Le texte faisait office de test pour le camp présidentiel : désormais privé de majorité absolue, il a dû compter sur le soutien des élus Les Républicains (LR) et du Rassemblement national (RN), qui ont salué certaines «avancées» tandis que la gauche s’est indignée d’un projet en forme de «déclaration de guerre aux salaires», contestant notamment la préférence affichée par la majorité pour le versement de primes à la place d’une augmentation des rémunérations.

Au sein de la Nupes, les socialistes se sont majoritairement abstenus (17 abstentions sur 31), contrairement au reste de la coalition de gauche qui s’est prononcée contre. Les Insoumis et la Gauche démocrate et républicaine ont voté en bloc contre le texte, tandis que 78 des 89 députés du RN ont apporté leur soutien au projet de loi, aux côtés des voix de LR (54 sur 62) et des différentes composantes de la majorité, selon le décompte établi par Le Monde.

Pendant les longs débats autour du texte, les attaques ont fusé entre les différents camps, la majorité s’étant par moments retrouvée spectatrice de l’affrontement entre les oppositions, le RN qualifiant entre autres les députés Insoumis de «bouffons rouges», tandis que ceux-ci les accusaient de marcher «main dans la main» avec le groupe macroniste.

Les principales mesures

Le texte adopté par l’Assemblée comporte la revalorisation des retraites et des prestations sociales à hauteur de 4%, le triplement à 6 000 euros du plafond de la prime Macron, le plafonnement de la hausse des loyers à 3,5% dans l’Hexagone et la facilitation de la résiliation en ligne des abonnements.

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Le consensus n’a guère été réuni que le 21 juillet, lorsque les députés ont voté à l’unanimité la déconjugalisation de l’allocation adultes handicapés, une mesure réclamée de toutes parts mais que l’exécutif avait refusée lors de la précédente législature.

«La colère du peuple vous a obligé à lâcher du lest», a ainsi savouré Hadrien Clouet, au nom du groupe La France Insoumise (LFI), dont les députés se sont montrés très offensifs, s’attirant de vives critiques de la part des autres groupes. Plus mesuré, Gérard Leseul, pour le groupe socialiste, a déploré que la méthode de l’exécutif n’ait «pas changé» malgré le souhait affiché d’une recherche de compromis lors du discours de politique générale d’Elisabeth Borne, ou encore lors d’une récente interview de Bruno Le Maire dans Le Monde.

Dans les faits, les quelques amendements des oppositions qui ont reçu le soutien du gouvernement venaient en grande majorité des bancs de LR. Résumant la position de son groupe sur le projet de loi, Thibault Bazin, député de Meurthe-et-Moselle, a d’ailleurs évoqué certaines mesures allant «dans le bon sens», tout en restant «très insuffisantes». Désireux d’apparaître comme pragmatique, le RN avait lui affiché sa volonté de voter le texte pour obtenir des avancées immédiates et a évoqué de «maigres mais réels gains de pouvoir d’achat» malgré de nombreuses carences. 

Un volet énergétique pour anticiper un hiver difficile

C’est notamment sur le volet énergétique que le texte gouvernemental a essuyé de très sévères critiques. Afin de parer à une possible réduction des livraisons de gaz russe, le projet de loi introduit des mesures qui ont suscité des remous de part et d’autre de l’hémicycle, dont l’instauration de dérogations au droit de l’environnement afin d’accélérer la mise en service d’un terminal méthanier au Havre. Celui-ci serait à même d’acheminer du gaz en provenance d’autres pays que la Russie, et permettrait de faire transiter du gaz de schiste en provenance des Etats-Unis.

Les députés de gauche se sont élevés contre la mesure : «Si la décision c’est de remplacer le gaz de Poutine par du gaz de schiste américain, c’est une pure folie», a dénoncé l’écologiste Delphine Batho, qui a qualifié ce choix de «suicidaire». «On parle de remplacer une énergie fossile par une autre énergie fossile. Pas d’émettre plus de CO2», a lancé, en réponse, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher.

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Par ailleurs, le texte permet de prendre des mesures exceptionnelles concernant notamment les centrales à gaz avec, par exemple, une possibilité de réquisition. Cette «mesure d’urgence» doit éventuellement permettre de rediriger le gaz de centrales produisant de l’électricité vers le «réseau de chaleur de telle sorte que l’on puisse chauffer les Français», a précisé le rapporteur Maud Bregeon (Renaissance), alors que l’Union européenne a annoncé un plan de réduction de la consommation de gaz, demandant à chaque Etat membre un effort à hauteur de 15%.

Un autre article du texte, offrant un cadre légal au redémarrage prochain de la centrale à charbon de Saint-Avold, a sans surprise suscité l’hostilité des écologistes, mais a également fait tiquer les Républicains et le RN, qui y vont vu la conséquence «désastreuse» de la politique énergétique du gouvernement. «Ce retour au charbon n’est pas une bonne nouvelle», a convenu Maud Bregeon, en défendant toutefois un recours «temporaire» pour répondre à une «situation exceptionnelle».

Cette partie des débats a aussi été marquée par des attaques du RN visant une partie des élus de gauche, le député Jean-Philippe Tanguy les accusant de «ne rien comprendre à la physique» et d’être des «nullités énergétiques». Evoquant les «escrologistes» et les «écocides», il s’est s’attiré en réponse un rappel au règlement de la part de l’élue écologiste Sandra Regol.

Au milieu des tensions, l’examen du texte a débouché sur l’autorisation, avec l’aval du gouvernement, de l’utilisation des huiles usagées comme carburant. «En France, on n’a a pas de pétrole mais on a de l’huile de friture», a plaisanté Julien Bayou (EELV), à l’origine de cet amendement, jugeant qu’«il vaut mieux dépendre des baraques à frites du Nord que du pétrole des monarchies pétrolières».

Les hostilités entre les différents camps pourraient reprendre rapidement puisque les députés commencent, dès ce 22 juillet à 15h, l’examen du projet de loi de finances rectificatives qui complète ces mesures et comporte quelques propositions sensibles, telle que la suppression de la redevance audiovisuelle.




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