Le vice-ministre russe des Affaires étrangères a évoqué le risque d'un affrontement entre la Russie et l'OTAN à cause de l'immixtion de celle-ci dans le conflit, tout en rappelant que Moscou n'emploierait d'arme nucléaire qu'en ultime recours.
Dans un entretien donné au quotidien Izvestia le 22 août, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov a qualifié de «dangereuse» l’attitude de l’OTAN dans le conflit ukrainien, estimant qu’elle pourrait conduire à un affrontement militaire entre l’Alliance atlantique et la Russie. Il a souligné qu’il fallait tout mettre en œuvre afin d’éviter un conflit entre puissances nucléaires, rappelant au passage la doctrine russe en matière d’emploi d’armes atomiques.
Le diplomate a notamment mis en cause la «politique destructrice» de l’OTAN qui consiste, selon lui, à ignorer les «lignes rouges» fixées par Moscou et à s’immiscer dans la confrontation entre la Russie et l’Ukraine, qui dure depuis maintenant six mois. D’après Sergueï Riabkov, le soutien de l’Alliance atlantique à Kiev l’amène à se retrouver «au bord du conflit armé direct» avec la Russie, ce qui fait peser le risque d’une «nouvelle escalade» qui pourrait aller «jusqu’à un affrontement militaire entre les puissances nucléaires», avec toutes les conséquences désastreuses que celui-ci entraînerait. «Il est nécessaire de l’éviter», a-t-il insisté.
L’utilisation d’armes nucléaires par la Russie n’est possible qu’en réponse à une attaque
Le vice-ministre des Affaires étrangères a rappelé à ce sujet les fondamentaux de la doctrine russe, basée sur deux scénarios. «La Russie autorise une réaction nucléaire en réponse à une agression avec l’utilisation d’armes de destruction massive contre nous ou nos alliés, ou à une agression au moyen d’armes conventionnelles, si cela menace l’existence même de l’Etat», a-t-il développé. «Le mot clé dans les deux scénarios est “agression”», a souligné Sergueï Riabkov, réaffirmant que «l’utilisation d’armes nucléaires par la Russie n’est possible qu’en réponse à une attaque pour se défendre dans des circonstances d’urgence».
En exposant à nouveau ces points essentiels de la doctrine de Moscou en matière de dissuasion nucléaire, le diplomate a tenu à balayer «les suppositions ou les fantasmes» qui ont pu être émis par les dirigeants et les médias occidentaux, notamment lorsque le président Vladimir Poutine avait mis en alerte la force de dissuasion russe en février 2022. Le dirigeant avait d’ailleurs lui-même rappelé, le 1er août, «qu’il ne [pouvait] y avoir de vainqueurs dans une guerre nucléaire» et qu’il fallait éviter celle-ci à tout prix. De la même manière, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov avait affirmé en mars que la Russie n’utiliserait l’arme nucléaire que si elle était confrontée à une «menace existentielle».
Une reprise du dialogue avec les Etats-Unis jugée peu probable
Interrogé sur les perspectives d’une reprise du dialogue stratégique avec les Etats-Unis, suspendu à l’initiative de ces derniers le 24 février 2022 à la suite du déclenchement de l’offensive russe en Ukraine, Sergueï Riabkov a déclaré que «la possibilité même de le rétablir n’est pas tout à fait évidente compte tenu de la politique agressive [et] sans discernement menée par Washington contre la Russie», politique qui se traduit tant par des livraisons d’armes à Kiev que par des sanctions économiques contre Moscou.
Il a cependant ajouté que la Russie restait attentive à «certains signaux en ce qui concerne la reprise du dialogue sur les armements stratégiques nucléaires», même si «on ne comprend toujours pas très bien ce que signifient ces signaux», a-t-il ajouté. Il a ainsi fait référence à l’idée émise par Joe Biden, le 1er août 2022, de «négocier rapidement» un nouveau cadre pour plafonner le nombre d’armes nucléaires dont disposent Washington et Moscou.
Le sujet avait déjà été évoqué lors du sommet de Genève en juin 2021 au cours duquel Vladimir Poutine avait salué la décision de son homologue américain Joe Biden de prolonger le traité New Start qui limite le nombre d’ogives nucléaires, de missiles et de bombardiers que la Russie et les Etats-Unis peuvent déployer, traité qui expirera en 2026. A l’époque, les deux chefs d’Etat s’étaient entendus sur une série de sujets, dont le retour de leurs ambassadeurs respectifs, une embellie qui n’aura été que de courte durée.
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