Revenant sur le scandale lié à l'ingérence du Qatar, le sénateur Renaissance André Gattolin a dépeint les pratiques selon lui des lobbys auprès des parlementaires, en particulier des fins de semaine arrosées par les bonnes grâces des alcooliers.
Le lobbying au Parlement européen semble agréable à plus d’un titre pour les élus, si l’on en croit le témoignage du sénateur Renaissance André Gattolin diffusé sur Public Sénat le 14 décembre. Interrogé sur le «Qatargate» qui ébranle actuellement l’institution, ce dernier a souligné qu’il portait gravement atteinte à l’image de l’assemblée, mais s’est en même temps dit peu étonné de ces révélations compte tenu des pratiques de divers lobbys bien installés à Bruxelles.
«Quand vous arrivez dans le hall du Parlement européen et qu’un grand constructeur automobile […] allemand a son modèle exposé, j’ai l’impression d’être au Salon de l’automobile», a décrit le sénateur des Hauts-de-Seine. «On cite le Parlement européen comme un exemple avec les listes de lobbyistes», a-t-il poursuivi en évoquant le registre de transparence recensant les groupes d’intérêt avec lesquels les institutions de l’Union «interagissent», selon la formule du Parlement, mais cette publicité est bien insuffisante, selon lui.
André Gattolin appelle à être «extrêmement vigilant»
«Tous les vendredis soir, les gens sont bourrés au Parlement européen parce qu’il y a tous les limonadiers et fournisseurs de bières qui payent des pots à tout le monde, et vous terminez la semaine comme ça», a-t-il dépeint, en appelant à être «extrêmement vigilant» contre toutes les tentatives de corruption ou de séduction qui visent les élus européens.
L’élu a cependant défendu le Parlement européen en tant qu’«endroit où on dit haut et fort ce que les gouvernements n’osent pas dire», même s’il a tempéré l’influence de cette assemblée, qui ne dispose pas de l’entièreté du pouvoir législatif. «Ils votent des résolutions sur les droits de l’homme et les libertés qui sont formidables. Mais dès qu’on passe au niveau exécutif, des Etats membres, tout fout le camp», a lancé le sénateur sans prendre de gants.
André Gattolin a aussi évoqué le précédent du «caviar-gate» en septembre 2017, qui avait touché l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. «C’est l’Azerbaïdjan qui arrosait les gens», a-t-il rappelé, les révélations d’un consortium de journalistes dans cette affaire ayant conduit à exclure une dizaine de membres de cette institution en charge des droits de l’homme. Selon l’élu, il est très «compliqué» d’adopter des mécanismes anti-corruption efficaces dans des instances internationales de ce type, en raison de la diversité des réglementations nationales en matière de financement des campagnes électorales et de dons.
A la suite du scandale de corruption présumée impliquant le Qatar, la présidente du Parlement européen Roberta Metsola a annoncé ce 15 décembre des réformes «d’ampleur» pour 2023, mentionnant en particulier le renforcement de la protection des lanceurs d’alerte et l’interdiction des groupes d’amitié non officiels avec des pays tiers. «Il y a des lacunes qui doivent être comblées, en ce qui concerne par exemple les activités d’anciens membres du Parlement européen, les inscriptions sur le registre de transparence, les personnes autorisées à entrer au Parlement européen», a-t-elle concédé.
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