L'opérateur français de satellites Eutelsat a fait savoir qu'il s'apprêtait à perdre des millions d'euros de revenus annuels en raison de l'interdiction de diffuser certaines chaînes russes et iraniennes.
Comme l’a rapporté la presse économique, le géant français des télécoms Eutelsat a expliqué le 22 décembre qu’il avait significativement abaissé sa prévision de chiffre d’affaires annuel à la suite de la cessation des activités de diffusion de certaines chaînes russes et iraniennes.
«Au titre de l’exercice 2022-2023, la mise en œuvre de ces mesures devrait avoir un impact négatif cumulé se situant dans une fourchette comprise entre 10 et 15 millions d’euros sur le chiffre d’affaires du groupe […] l’impact sur le cash-flow libre discrétionnaire ajusté du groupe au titre de l’exercice 2022-2023 est estimé à environ 10 millions d’euros», a ainsi détaillé le magazine Capital.
«Le montant représente 2,2% des revenus de diffusion déclarés par Eutelsat pour son exercice précédent [qui s’est terminé en] juin 2022», a précisé le jour-même Spacenews.
L’entreprise Eutelsat mise en demeure par l’Arcom
Cette cessation d’activité de diffusion est en partie liée à une mise en demeure que le gendarme français de l’audiovisuel, l’Arcom, a adressée à Eutelsat à la mi-décembre, appuyant sa décision sur la convention européenne sur la télévision transfrontière. L’instance française y sommait l’entreprise d’arrêter la diffusion des chaînes russes Rossiya 1, Perviy Kanal et NTV, toutes trois accusées par l’ONG Reporters sans frontières (RSF) de «propagande de guerre».
«La France ne peut tolérer une situation où des opérateurs relevant de sa juridiction contribuent à la propagande de guerre du Kremlin, en méconnaissance de leurs obligations légales. Le régulateur français de l’audiovisuel a les moyens de mettre fin à cette situation, et nous l’appelons à agir sans délai», a en effet déclaré en septembre Christophe Deloire, le secrétaire général de RSF, lorsqu’il avait annoncé une saisie de l’Arcom à ce sujet.
«En application de sa politique de mise en œuvre systématique des décisions prises par l’Arcom, Eutelsat n’interviendra plus dans la diffusion [des trois chaînes susmentionnées] à l’issue du délai de sept jours accordé», a de son côté assuré l’entreprise de télécommunications, ici citée le 14 décembre par l’AFP.
Depuis le lancement de l’opération militaire russe en Ukraine, en février, de nombreuses mesures de sanction ont été prises à l’encontre de médias financés par la Russie (dont RT France). Si dans le cas d’Eutelsat, la mise en demeure émanait de l’Arcom, le groupe RT, et plusieurs autres médias comme Sputnik, ont été sanctionnés directement par une décision de la Commission européenne, qui n’avait alors pas été en mesure, pour appuyer cette décision, de citer la moindre fake news dont se seraient rendus coupables ces médias. Et pour cause : la chaîne RT France n’a jamais été sanctionnée par le régulateur français des médias.
RT France a fait appel cet été d’une décision de la justice de l’Union européenne, qui confirmait l’interdiction de diffusion du média au sein de l’UE. L’avocat de RT France avait alors dénoncé une méconnaissance de «la liberté d’expression dont doit disposer, en toutes circonstances, tout média d’information, sous le contrôle de son régulateur national».
En outre, un certain nombre de personnalités médiatiques et politiques sont montées au créneau pour dénoncer cette mesure liberticide et une pétition en ligne contre l’interdiction de RT France a mobilisé plus de 50 000 signataires.
Le 16 décembre, l’UE a publié un texte au Journal officiel, listant les entités ciblées par son nouveau paquet de sanctions et dans lequel figure TV-Novosti, la maison mère des chaînes RT (dont RT France).
La maison mère de RT France visée par les nouvelles sanctions antirusses de l’UE