Débutés ce 17 novembre, les entretiens d’Emmanuel Macron avec les chefs de partis sont ternis par les défections de plusieurs représentants politiques et par les critiques de plus en plus nombreuses de la méthode présidentielle. En rencontrant directement les oppositions, le président trahit-il les principes de la démocratie représentative ?
Boycottés par Les Républicains, les Insoumis et le Parti socialiste, les troisièmes rencontres de Saint-Denis ne se déroulent pas comme prévu pour le président de la République. Cette réunion, débutée le 17 novembre au matin, visait à «créer du consensus», en évoquant essentiellement la question du référendum d’initiative partagée, dont le président dit vouloir faciliter l’organisation, mais aussi les conflits à Gaza et en Ukraine. Plus généralement, le président entend se servir de ces rencontres transpartisanes pour trouver un compromis afin de faire passer sa réforme des institutions, une de ses promesses de campagne de 2022.
Entre méfiance et boycott des partis
«Derrière les mots il n’y a pas grand-chose, on multiplie les grenelles, les conférences, les grands débats, c’est bien mais il faut que ça débouche sur du concret» : avant son entretien avec le chef de l’Etat, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a montré des signes de lassitude quant à ces rencontres de Saint-Denis.
Son homologue écologiste Marine Tondelier a, elle, justifié sa présence alors que ses alliés insoumis et socialistes ont refusé de participer à ces échanges à huis clos, en déclarant n’être «ni dupe ni naïve». «Si les chefs de parti, le président de la République et la Première ministre n’arrivent plus à se parler, alors on s’enferme dans une forme d’incommunicabilité préjudiciable», a-t-elle estimé.
L’élue écologiste s’est ainsi démarquée du coordinateur national des Insoumis, qui avait justifié son absence en dénonçant des «exercices monarchiques» qui «visent à contourner le débat organisé dans ses formes constitutionnelles». Le secrétaire général du Pari socialiste Olivier Faure, également absent, avait évoqué une «mise en scène».
Enfin le président des Républicains Eric Ciotti a déclaré ne pas vouloir aller à ce rendez-vous du fait de l’absence du président à la marche contre l’antisémitisme. Il a également dénoncé la démarche présidentielle dans un courrier dans lequel il s’en est pris au chef de l’Etat : «En démultipliant les initiatives extérieures au champ institutionnel, vous participez à les affaiblir et à nourrir la crise de la démocratie.»
Saint-Denis, nous ne serons pas les alibis d’une communication permanente et impuissante. pic.twitter.com/ezb4S2tOek
— Eric Ciotti (@ECiotti) November 14, 2023
«Que de la communication»
Des observateurs de la vie politique française entretiennent les mêmes inquiétudes que le chef de fil des Républicains. Ainsi, le haut fonctionnaire Alain Minc, qui avait soutenu le président Macron en 2017, a déclaré sur la chaîne Public Sénat ce 17 novembre au matin qu’«à la fin des fins, les conventions citoyennes, les rencontres de Saint Denis… Tout ça est une forme d’affaiblissement de la démocratie représentative». Le journaliste Franz-Olivier Giesbert a lui affirmé sur LCI ce 17 novembre : «Ce n’est que de la communication.» Et d’évoquer un président qui «depuis qu’il est élu essaye de passer par-dessus les institutions». Des critiques pour ces troisièmes rencontres qui font écho à celles déjà formulées dès la première rencontre de Saint-Denis d’août dernier : le journaliste du Figaro Yves Thréard évoquait alors une «illusion démocratique».
Marche contre l’antisémitisme : Macron «a raté un rendez-vous avec l’Histoire» selon Bardella