Le 4 décembre, Rosatom était l'organisateur de la Journée des Petits Réacteurs Modulaires (PRM), un événement qui se déroulait à Dubaï en marge de la conférence sur les changements climatiques COP28. L'occasion pour le géant russe du nucléaire de présenter ses dernières prouesses techniques et de conquérir de nouveaux marchés.
Journée des Petits réacteurs modulaires organisée sous l’égide de la Russie.
Rosatom était l’hôte de la Journée des Petits réacteurs modulaires (PRM) qui avait lieu à Dubaï le 4 décembre en marge de la COP 28. Le fleuron russe du nucléaire a évoqué cet événement dans un communiqué publié sur son site.
«Nous sommes convaincus que l’énergie nucléaire sera amenée à devenir le fondement de l’équilibre bas carbone que nous recherchons tous», a déclaré le directeur général de Rosatom Alexeï Likhatchov dans une vidéo d’accueil des participants. Selon lui, «la génération d’énergie nucléaire de faible capacité va occuper une place de choix dans l’avenir du nucléaire en tant que solution technologique fiable».
Cette manifestation accueillait la directrice de la World Nuclear Association, Sama Bilbao y Leon, ainsi que les représentants de ministères et d’entreprises de nombreux pays qui ont abordé les modalités et applications nationales des innovations technologiques de Rosatom.
Les PRM, la panacée à la pénurie d’énergie ?
A la différence des grands réacteurs conventionnels dont la capacité électronucléaire dépasse 700 Méga watt électrique (MWe), celle des PRM peut aller jusqu’à 300 MWe par tranche, soit environ un tiers de la capacité de production des premiers. Etant donné leur échelle plus réduite (de quatre à dix fois inférieure par rapport aux réacteurs conventionnels), Rosatom fait valoir que les PRM peuvent être implantés dans des lieux inadaptés aux centrales nucléaires de plus grande taille. L’entreprise russe explique que les unités sont préfabriquées en usine (c’est le sens de «modulaire»), ce qui réduit les surcoûts et les retards de fabrication.
Rosatom décrit ces PRM comme plus simples et plus sûrs en raison de leurs qualités intrinsèques (car leur puissance et leur pression d’utilisation sont plus faibles), et moins consommateurs de combustible que les centrales traditionnelles. En effet, la fréquence de leur renouvellement est estimée entre trois et sept ans, contre un ou deux ans en temps normal.
«Tout le monde parle des PRM il faut aussi prendre en compte ce qui s’est passé à la COP 28 il y a quelques jours de cela, où 22 pays se sont engagés à tripler leur capacité nucléaire», s’est enthousiasmée Princy Mthombeni, fondatrice de Africa4Nuclear. Elle considère que «cette journée arrive à point nommé… c’était passionnant de découvrir les technologies développées par Rosatom».
Un avis partagé par le ministre de l’Énergie du Ghana Robert B. M. Sogbadji, qui considère les PRM comme une «bonne option» pour les pays qui ne peuvent se permettre de financer de grandes centrales. Il a anticipé que ces dispositifs auraient un «rôle critique» à jouer dans la «transition énergétique» des pays africains.
Il existe à ce jour 70 projets de PRM dans le monde, a indiqué Kirill Komarov, premier adjoint du directeur de Rosatom pour le développement et le commerce international. Ces projets sont développés sur le sol comme c’est le cas d’habitude, mais aussi sur l’eau à l’instar de la seule centrale nucléaire flottante (FNPP pour Floating Nuclear Power Plant) embarquée sur le navire cadémicien Lomonossov. Depuis sa mise en service en 2020, cette dernière a déjà produit 700 millions de KWe d’électricité pour la ville de Kevek, la plus septentrionale du pays, où il est amarré. Ce système permet ainsi d’approvisionner en énergie des endroits difficiles d’accès.
Le nucléaire, «clé dans le combat contre le changement climatique»
«Nous savons tous qu’il n’existe pas de net zéro 2050 sans le nucléaire», a également souligné Princy Mthombeni, faisant référence à l’objectif d’empreinte carbone négligeable préconisée par le GIEC (Groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat) dans un rapport de 2018. Elle a ajouté que le remplacement des centrales à charbon vétustes et polluantes par le nucléaire représenterait un progrès écologique significatif pour l’Afrique. C’est pour ces mêmes raisons que la Mongolie, représentée par Dalaijargal Dorjbal, directeur exécutif de l’entreprise nationale MonAtom, a signé avec Rosatom des accords de coopération pour les 15 prochaines années.
Un enthousiasme partagé par la directrice générale de la World Nuclear Association Sama Bilbao y León, qui s’est félicitée de ce que «pour la première fois tout le monde a reconnu l’énergie nucléaire comme un élément vraiment clé dans le combat contre le changement climatique, son atténuation et son adaptation». Elle estime qu’il faut désormais «passer à la deuxième étape », c’est à dire «mettre en place des mesures et des programmes relatifs au marché et aux financements» afin d’accélérer la construction de nouvelles structures nucléaires. Elle s’est enfin dite «incroyablement optimiste» quant aux opportunités de l’énergie nucléaire dans les activités humaines, «que ce soit pour l’électricité, les applications industrielles, l’eau fraîche ou le chauffage».
La prééminence du nucléaire russe a été reconnue par le think tank américain Energy Innovation Reform Project (EIRP) dans une analyse datant d’avril dernier. Il y était affirmé que la Russie était le «leader mondial sur le marché de l’exportation de produits nucléaires, Rosatom contrôlant près de la moitié du processus d’enrichissement d’uranium et 70% de l’exportation de réacteurs nucléaires». Le rapport concluait sur le constat que «réduire le poids global de Rosatom ne serait un défi ni rapide, ni facile, ni bon marché».
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