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Pluie d’hommages occidentaux pour Madeleine Albright, icône d’un embargo meurtrier en Irak

De nombreux responsables politiques occidentaux ont rendu hommage à Madeleine Albright, décédée le 23 mars 2022. Première femme au poste de secrétaire d’Etat des Etats-Unis, elle avait revendiqué les lourdes conséquences de l'embargo contre l'Irak.

L’ancienne secrétaire d’Etat américaine Madeleine Albright, première femme à occuper ce poste au sein du gouvernement américain, est morte le 23 mars à l’âge de 84 ans des suites d’un cancer, a annoncé sa famille dans un communiqué. D’abord ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU de 1993 à 1997, elle fut ensuite à la tête de la diplomatie américaine entre 1997 et 2001 sous l’administration du président démocrate Bill Clinton. Sa disparition a suscité de nombreux hommages et commentaires positifs de la part des dirigeants occidentaux.

Madeleine Albright était «une voix passionnée pour la liberté et la démocratie», a salué Bill Clinton, soulignant que sa mort était «une perte immense pour le monde à un moment où nous avons le plus besoin des enseignements de sa vie». «C’était une immigrée fuyant les persécutions», a-t-il rappelé dans un communiqué, ajoutant que comme «tant d’autres avant et après elle, elle était fièrement Américaine». L’ancien président a rendu hommage à certains de ses nombreux combats, pour «mettre fin au nettoyage ethnique en Bosnie et au Kosovo» ou encore «soutenir une expansion de l’OTAN aux pays d’Europe centrale». 

Elle a contribué à «changer le cours de l’Histoire», a salué pour sa part le président actuel, Joe Biden.

Antony Blinken, actuellement à la tête du département d’Etat américain, a salué une «diplomate brillante» qui «a passé sa vie à servir» son pays d’adoption. «Ayant vécu directement les horreurs de la guerre […], elle pensait que les Etats-Unis doivent répondre avec force aux dictateurs et aux tyrans», a-t-il commenté.

En avril 2012, en lui décernant la «médaille présidentielle de la liberté», la plus haute décoration civile des Etats-Unis, l’ancien président Barack Obama avait quant à lui salué son «courage et sa ténacité qui ont permis de ramener la paix dans les Balkans et ont ouvert la voie au progrès dans certains des lieux les plus instables du monde». Il a réagi à son décès en saluant une «championne des valeurs démocratiques». Les louanges sont également venues de l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, qui a assuré que Madeleine Albright était l’une «des personnes les plus remarquables» avec lesquelles il ait eu le privilège de travailler, louant sa «profonde compassion pour l’humanité».

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a également salué «une Atlantiste dévouée, une grande femme», engagée pour «la démocratie et la liberté».

Des commentaires cyniques sur l’embargo imposé à l’Irak remontent à la surface

Ce déluge de louanges n’a pas fait l’unanimité, certains commentateurs ayant rappelé les propos cyniques tenus par Madeleine Albright à propos des conséquences de l’embargo ayant visé l’Irak dans les années 90. Le journaliste canadien Aaron Maté a ainsi publié la vidéo d’une interview de l’ancienne secrétaire d’Etat donnée sur le sujet en 1996, en qualifiant avec ironie l’ancienne secrétaire d’Etat de «l’un des meurtriers de masse des plus honnêtes de l’histoire». Dans la vidéo en question, la journaliste de CBS interroge Madeleine Albright sur les conséquences de l’embargo qui frappe l’Irak depuis 1990, qui aurait entraîné la mort d’un demi-million d’enfants, faute de nourriture et de médicaments. La responsable américaine répond alors qu’il s’agissait d’une «décision difficile», avant d’ajouter: «Nous pensons que le prix en valait la peine.»

Un Irakien expliquant avoir vécu cette période a commenté cet extrait : «J’étais l’un de ces millions d’enfants qui ont souffert des sanctions. J’ai failli mourir à cause du manque de médicaments contre l’asthme, à cause des sanctions américaines. Que Dieu lui pardonne, mais je ne le ferai jamais».

Interventionnisme humanitaire et armé

Le Figaro rappelle, par ailleurs, que «l’interventionnisme humanitaire et armé» qui guidait Madeleine Albright lui avait valu de nombreuses critiques à Washington même : elle avait poussé Bill Clinton à intervenir au Kosovo en 1999 pour empêcher ce qui était présenté à l’époque comme un génocide contre les musulmans par le dirigeant serbe Slobodan Milosevic, qu’elle accusait alors de perpétrer des «horreurs aux proportions bibliques». Cette intervention de l’OTAN sans mandat des Nations unies, qui avait abouti au bombardement de Belgrade, avait contribué à la dégradation des relations avec la Russie et préfiguré d’autres opérations militaires américaines. Par la suite cependant, elle avait critiqué la guerre en Irak mené par George Bush Junior, y voyant «la plus grande catastrophe de notre politique étrangère, pire que le Vietnam». «Avant, lorsque les gens entendaient “Amérique”, ils pensaient à la libération de l’Europe occupée par les nazis, ou au plan Marshall. Aujourd’hui, ils pensent à Guantanamo et Abou Ghraib», avait-elle déclaré en 2008.

Madeleine Albright avait écrit un ultime éditorial dans le New York Times le 23 février, estimant que le déclenchement d’une offensive en Ukraine serait une «erreur historique» pour la Russie. Ayant assisté à l’ascension de Vladimir Poutine et l’ayant rencontré en 2000, l’ancienne secrétaire d’Etat avait alors écrit dans l’un de ses carnets que «Poutine est petit et pâle, tellement froid qu’il en est presque reptilien». Evoquant la chute de l’URSS, elle avait estimé que le président russe «est embarrassé par ce qui est arrivé à son pays, et […] déterminé à restaurer sa grandeur».




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