Les autorités polonaises ont décidé de changer la manière dont ils nommaient, sur leurs propres documents, l’enclave russe de Kaliningrad. Une décision qui a fait réagir Moscou et les autorités de cette région cernée par l’UE et l’OTAN.
Królewiec : tel est le nom qui apparaîtra dorénavant, en lieu et place de Kaliningrad, sur les documents officiels et les cartes polonaises. «Nous ne souhaitons pas la russification en Pologne, d’où notre décision d’appeler Kaliningrad et sa région dans notre propre langue», a déclaré ce 10 mai le ministre polonais du Développement Waldemar Buda, cité dans un communiqué officiel.
La veille, le quotidien conservateur polonais Rzeczpospolita révélait que la Commission de normalisation des noms géographiques extérieurs à la République de Pologne avait recommandé de ne plus employer le nom de Kaliningrad, tant pour la ville que sa région éponyme. Une modification qui entrait en vigueur le jour même de cette annonce, à savoir le 9 mai.
Autrefois nommée Königsberg, lorsqu’elle était allemande, la citée teutonique fut rebaptisée en 1946 Kaliningrad par les autorités soviétiques. Un nom faisant référence à Mikhaïl Kalinine, président du Præsidium du Soviet suprême de 1938 à 1946. Aux yeux de la commission polonaise, le fait qu’aux frontières de l’actuelle Pologne, une ville puisse avoir été nommée ainsi représenterait une «provocation». Un argumentaire repris mot pour mot par Waldemar Buda.
«Le fait d’avoir pourvu une grande ville près de notre frontière du nom de Kalinine, un criminel coresponsable de la décision sur l’exécution massive des officiels polonais à Katyn en 1940, éveille en Pologne des émotions négatives», a ainsi déclaré le ministre.
«Notre ville a un nom»
Dmitri Peskov, porte-parole de la présidence russe, a aussitôt réagi à l’officialisation de cette décision, estimant qu’elle n’apportait «rien de bon pour la Pologne. Ce ne sont pas seulement des actions inamicales : ce sont des actions hostiles». Selon lui, il ne s’agirait «même plus de russophobie, ce sont des processus à la limite de la folie qui se passent en Pologne».
Quant aux autorités de Kaliningrad, celles-ci voient une «insinuation» de leur voisin dans cette décision de poloniser leur nom. «Notre ville a un nom, le toponyme officiel est Kaliningrad. Tout le reste n’est qu’insinuation», a déclaré auprès de l’agence TASS Dmitri Lyskov, chef du service de presse du gouvernement régional. «On pourrait également appeler Gdansk “Dantzig”, et la République de Pologne “le Royaume de Pologne”, raille-t-il. Avant de poursuivre : «Mais nous adhérons aux toponymes officiels, c’est ce que nous exigeons des autres.»
Si Kaliningrad fut taillée dans la Prusse-Orientale après la victoire alliée contre l’Allemagne nazie, conformément aux accords des conférences de Yalta et de Potsdam, la majeure partie de cet ancien territoire allemand fut cédée à l’actuelle Pologne.
Cette enclave stratégique et militarisée, siège de la flotte russe en mer Baltique, partage des frontières avec la Pologne et la Lituanie, soient deux pays de l’OTAN et de l’Union européenne qui soutiennent fermement Kiev depuis le lancement de l’opération militaire russe en Ukraine, le 24 février 2022. Au printemps de cette même année, encouragé par Varsovie, Vilnius avait ainsi décrété un embargo sur le transit de marchandises russes vers Kaliningrad. Quelques mois plus tard, Varsovie avait annoncé la construction d’une barrière de barbelés à sa frontière avec Kaliningrad, prétextant que les Russes pourraient y favoriser le passage de migrants africains.
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