Défendue par la gauche et les centristes, le projet de taxe sur les superprofits a été rejetée par le Sénat à majorité de droite, aligné sur le gouvernement qui était contre cette proposition.
Après l’Assemblée nationale il y a un peu plus d’une semaine, le Sénat à majorité de droite a rejeté à son tour le 1er août l’idée d’une taxe sur les «superprofits» ou «bénéfices exceptionnels» des grands groupes, malgré une offensive conjuguée de la gauche et des centristes.
Les amendements au projet de budget rectificatif pour 2022 pour tenter de mettre en place une telle taxation, déjà appliquée en Grande-Bretagne ou en Italie, ont tous été rejetés.
Vote serré
Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, avait d’emblée redit son opposition au «réflexe pavlovien de la taxe», soutenant que les grandes entreprises «doivent participer à l’effort collectif, en rendant l’argent directement aux Français plutôt qu’au Trésor public».
«Vous réduisez les propositions des sénateurs à des “réflexes pavloviens”, mais les chiens de garde du Parlement que nous sommes veillent pourtant sur la Nation avec un esprit de justice fiscale et sociale», a rétorqué la centriste Sylvie Vermeillet.
Il n’y a rien de choquant pour nous à avoir une taxe qui est bornée dans le temps
Le groupe centriste a proposé d’instituer, pour les entreprises dont le bénéfice net aurait été en 2021 supérieur de 20% à la moyenne des trois années 2017, 2018 et 2019, une «contribution exceptionnelle de solidarité sur les superprofits» à hauteur de 20%.
«On a été capables de voter des soutiens exceptionnels [pour les entreprises], il me semble aujourd’hui qu’on peut espérer une contribution exceptionnelle», a plaidé Sylvie Vermeillet. «Il n’y a rien de choquant pour nous à avoir une taxe qui est bornée dans le temps», a appuyé la centriste Nathalie Goulet.
L’amendement a finalement été rejeté par 155 voix pour et 177 contre.
Le groupe PS a pour sa part mis sur la table une taxe exceptionnelle de 25% sur les superprofits des sociétés pétrolières et gazières, les sociétés de transport maritime, comme CMA CGM, et les concessionnaires d’autoroutes.
Selon le PS, cette taxe permettrait de récolter environ 4 milliards d’euros pour Total, 925 millions d’euros pour Engie, 4,4 milliards d’euros pour CMA-CGM, et 875 millions d’euros pour les concessionnaires d’autoroutes.
Elle «rétablirait de l’équité fiscale entre les entreprises françaises», selon Rémi Féraud. «Il faut qu’on sorte de ce débat avec au moins un euro de contribution des entreprises», a exhorté Pascal Savoldelli pour le groupe CRCE à majorité communiste.
Pour l’écologiste Daniel Breuiller, «il faut des petits impôts pour les petits revenus et de gros impôts pour les gros bénéfices».
La droite opposée à des mesures «faussement équitables»
«Tous ces amendements ont le goût sucré des mesures qui n’ont que l’apparence de la justice sociale», a balayé le chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau, les jugeant «faussement efficaces et faussement équitables». Entre autres arguments pour s’opposer à une taxe, le ministre a lui mis en avant la «stabilité fiscale» qui «n’a pas de prix».
«Les grandes entreprises vont faire un effort pour aider les Français», a rappelé le patron des sénateurs RDPI, à majorité La République en marche, François Patriat. Si elles «ne tiennent pas leurs engagements, alors nous en tiendrons compte dans le budget futur».
TotalEnergies a par exemple annoncé une remise de 20 centimes d’euros par litre de carburant à la pompe entre septembre et novembre dans toutes ses stations-service, puis de 10 centimes par litre sur le reste de l’année.
La taxe sur les «superprofits» de certaines multinationales rejetée par l’Assemblée nationale