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Cadre, écologiste, féministe : qui est Sophie Binet, la nouvelle secrétaire générale de la CGT ?

A la surprise générale, l'ancienne secrétaire de la Fédération des cadres a été élue à la tête du syndicat. Il s'agit d'un désaveu pour le secrétaire sortant Philippe Martinez, le congrès ayant révélé plusieurs fractures internes.

Le congrès de la CGT a été marqué par un «coup de théâtre», selon la formule de l’AFP, avec l’élection surprise ce 31 mars de l’ex-responsable de l’Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens (Ugict), Sophie Binet, au poste de secrétaire générale de la CGT. Elle prend ainsi la suite de Philippe Martinez et devient ainsi la première femme à la tête du syndicat depuis sa création en 1895.

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Son élection est survenue au terme de longues tractations au cours desquelles aucune des deux candidates jusqu’alors pressenties n’a réussi à s’imposer : ni Marie Buisson, la «dauphine» du secrétaire général sortant Philippe Martinez, ni Céline Verzeletti ne sont parvenues à faire consensus sur leur nom. La proposition d’équipe dirigeante de Marie Buisson, avec elle-même comme secrétaire générale, a ainsi été rejetée par le Comité confédéral national, le parlement du syndicat.

Les membres de la Commission exécutive confédérale (CEC) – la direction élargie du syndicat – ont ensuite réfléchi à une solution autour de Céline Verzeletti, sans parvenir à un accord. Une «troisième voie» a alors émergé autour de Sophie Binet, dont le nom avait été évoqué ces derniers mois, sans apparaître comme une option solide. Face à une «impasse», «les instances ont donc décidé de se tourner vers Sophie Binet, malgré son statut de cadre peu compatible de prime abord avec l’image de la CGT», souligne Le Figaro.

Un engagement féministe

Le profil de la nouvelle secrétaire générale semble de prime abord assez éloigné de celui de tenants d’une ligne «dure», comme par exemple Olivier Mateu, secrétaire départemental de la fédération des Bouches-du-Rhône, qui s’est fait remarquer par des prises de parole très offensives contre le gouvernement et la réforme des retraites.

Agée de 41 ans, Sophie Binet a commencé par militer au sein du syndicat étudiant Unef et au Parti socialiste, et a exercé le métier de conseillère principale d’éducation (CPE). Son engagement syndical a notamment été marqué par la mobilisation contre la loi Travail en 2016, Sophie Binet ayant lancé la pétition #LoiTravailNonMerci aux côtés de la féministe Caroline de Haas. Après avoir pris la tête de l’Ugict en 2018, elle a été la co-auteure du livre Féministe, la CGT ? Les femmes, leur travail et l’action syndicale, publié en 2019. Sophie Binet était en outre référente du collectif «femmes mixité» du syndicat, et engagée sur les questions environnementales.

Des dissensions internes autour de l’alliance avec la mouvance écologiste

Son élection clôt une semaine de congrès houleux, durant lequel des fractures profondes se sont exprimées au sein de la CGT, avec des marques de défiance de nombre d’organisations vis-à-vis de la direction sortante, en particulier de la part de plusieurs puissantes fédérations industrielles (cheminots, énergie, chimie). Le 28 mars, les congressistes avaient rejeté le rapport d’activité de la direction sortante (50,32% des voix contre), un événement sans précédent dans l’histoire de la CGT et un désaveu majeur pour Philippe Martinez.

Philippe Martinez au côté du leader de la CFDT Laurent Berger, le 31 janvier (image d'illustration).

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Les débats sur le document d’orientation ont montré des désaccords considérables entre cégétistes sur l’écologie ou encore sur les questions internationales, certains souhaitant que la CGT réadhère à la Fédération syndicale mondiale (FSM) qu’elle a quittée en 1995. Le point de crispation le plus aigu a sans doute été la question de l’appartenance de la CGT au collectif «Plus jamais ça», que la CGT a cofondé en mars 2020 avec des ONG et des associations, dont Greenpeace et Oxfam, dans lequel Marie Buisson représentait la CGT. Les propositions portées par ce collectif, dont l’arrêt du soutien aux énergies fossiles et au développement de nouveaux réacteurs nucléaires, ont ainsi été critiquées par la Fédération des mines et de l’énergie (FNME-CGT), très active dans le mouvement actuel de contestation de la réforme des retraites, comme le relate le média en ligne Rapports de force.

«Cela fait de nombreuses années que le syndicat est tiraillé entre d’un côté, les tenants d’une ligne dure, ancrée dans la lutte des classes, pour le nucléaire qui maintient des emplois industriels, qui ne fait ni de concessions avec le gouvernement, ni d’alliances avec la CFDT, et de l’autre, une ligne plus ouverte, sur la discussion, les rapprochements avec d’autres centrales, etc.», a décrypté un connaisseur du syndicat auprès de La Tribune.

Si le mouvement de contestation actuel permet au syndicat de regagner en popularité, la nouvelle secrétaire générale devra tenter de surmonter ces tiraillements internes et de regagner des adhérents, la CGT se trouvant aussi confrontée à la concurrence de la CFDT qui a joué un rôle important dans l’opposition au projet gouvernemental. Au sein du bureau confédéral de la CGT, l’élection du leader des cheminots Laurent Brun au poste d’administrateur, soit l’équivalent de numéro 2, est à noter.

«Nous ne lâcherons rien», a répété à plusieurs reprises la nouvelle secrétaire générale lors de sa première prise de parole, répondant à l’enjeu le plus pressant du moment, à savoir la lutte contre la réforme des retraites et l’invitation d’Elisabeth Borne à venir dialoguer à Matignon le 5 avril. «Nous irons, toute l’intersyndicale, unie, pour exiger le retrait de cette réforme de façon ferme, déterminée», a déclaré Sophie Binet à la tribune. «Il n’y aura pas de trêve, pas de suspension, pas de médiation», a-t-elle poursuivi, ajoutant : «On ne reprendra pas le travail tant que cette réforme ne sera pas retirée.»

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