Téhéran a averti Paris d’une «réponse efficace et ferme» après la publication de caricatures jugées «insultantes» du guide suprême de l'Iran, l'ayatollah Ali Khamenei, dans le magazine satirique français Charlie Hebdo.
«L’acte insultant et indécent d’une publication française en publiant des caricatures contre l’autorité religieuse et politique ne restera pas sans réponse efficace et ferme», a déclaré le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, le 4 janvier sur Twitter. «Nous ne permettrons pas au gouvernement français de dépasser les bornes», a-t-il ajouté.
اقدام توهین آمیز و خارج از نزاکت نشریه ای فرانسوی در انتشار کاریکاتور علیه مرجعیت دینی و سیاسی بدون پاسخ قاطع و موثر نخواهد بود. به دولت فرانسه اجازه نمیدهیم پا را از گلیم خود فراتر گذارد.آنها قطعا مسیر اشتباهی را انتخاب کرده اند. پیشتر این نشریه را در فهرست تحریمها قرار دادیم.
— H.Amirabdollahian امیرعبداللهیان (@Amirabdolahian) January 4, 2023
Cette publication survient alors que l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a publié le jour-même des dizaines de caricatures mettant en scène la plus haute personnalité religieuse et politique de la République islamique.
«C’était une manière de montrer notre soutien aux Iraniennes et aux Iraniens qui mettent en jeu leur vie pour défendre leur liberté face à la théocratie qui les opprime depuis 1979», a déclaré dans un éditorial le directeur de la publication Laurent Sourisseau, connu sous le nom de Riss. Tous les dessins publiés «ont le mérite d’avoir bravé l’autorité que prétend être le guide supposé suprême, ainsi que la cohorte de ses serviteurs et autres spadassins», a-t-il ajouté.
Il s’agit des caricatures retenues dans le cadre d’un concours lancé en décembre, alors que des manifestations se multipliaient en Iran après la mort en détention le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne arrêtée pour avoir enfreint le code vestimentaire strict du pays. Charlie Hebdo avait expliqué en décembre que ce «concours international pour produire des caricatures» de Khamenei visait à soutenir les «Iraniens qui se battent pour leur liberté».
Les autorités iraniennes affirment que des centaines de personnes, dont des membres des forces de sécurité, ont été tuées et des milliers d’autres arrêtées dans ce qu’elles décrivent généralement comme des émeutes. D’ailleurs, Téhéran a accusé à plusieurs reprises des puissances étrangères et des groupes d’opposition d’attiser les troubles.
L’ambassadeur de France à Téhéran convoqué par la diplomatie iranienne
Le numéro de Charlie Hebdo paru le 4 janvier contient plusieurs dessins d’ordre sexuel montrant l’ayatollah Khamenei et d’autre religieux iraniens, alors que d’autres caricatures dénoncent le recours à la peine capitale comme tactique pour intimider les manifestants.
A Téhéran, l’ambassadeur de France Nicolas Roche a été convoqué le 4 janvier au soir par le ministère des Affaires étrangères. «La République islamique d’Iran, n’accepte, en aucune façon, l’insulte de ses valeurs […] islamiques, religieuses et nationales […] et la France n’a pas le droit d’insulter ce qui est sacré […] pour les pays musulmans sous le prétexte de la liberté d’expression», a indiqué le porte-parole du ministère Nasser Kanani.
L’Iran tient «le gouvernement français pour responsable de cet acte haineux, insultant et injustifié», a-t-il ajouté dans un communiqué, précisant attendre des «explications» de Paris. Ainsi que l’a rapporté l’AFP, l’Iran a fermé un institut français après la publication de ces caricatures.
L’eurodéputée et ancienne ministre Nathalie Loiseau, une des personnalités les plus actives de la macronie sur les réseaux sociaux, a elle décrit la réaction iranienne comme une «tentative d’ingérence» et une «menace» sur Charlie Hebdo. «Que ce soit parfaitement clair : le régime répressif et théocratique de Téhéran n’a aucune leçon à donner à la France», a-t-elle déclaré sur Twitter.
A Washington, le porte-parole du département d’Etat Ned Price, questionné au sujet des caricatures publiées le même jour, a indiqué à la presse que les Etats-Unis se tenaient «du côté de la liberté d’expression» que ce soit «en France ou en Iran».
Charlie Hebdo a publié les caricatures dans une édition spéciale pour l’anniversaire de l’attentat meurtrier contre son bureau parisien le 7 janvier 2015. Ce dernier avait été perpétré par des assaillants déclarant agir au nom d’Al-Qaïda pour venger la décision du journal de publier des caricatures du prophète Mahomet. La publication de ces caricatures avait suscité beaucoup de colère dans les pays musulmans, et les attentats de 2015 avaient apporté une vague de soutien au magazine à travers le monde.
Les publications de Charlie Hebdo sont régulièrement à l’origine de polémiques, alimentant invariablement les passions des uns et des autres sur des sujets de société ou liés à la religion. En tout état de cause, les vagues d’indignation que suscitent les choix du magazine lui offrent une visibilité non négligeable.
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