Dans un climat tendu, à Zababdeh, un petit village chrétien de 5 000 âmes en Cisjordanie, les habitants prient pour les Gazaouis. Depuis le 7 octobre, plus de 300 Palestiniens ont été tués dans les territoires occupés.
Un silence inhabituel s’est abattu sur les rues de Zababdeh, un village palestinien qui abrite l’une des plus grandes communautés chrétiennes de Cisjordanie occupée. Avec la guerre à Gaza dans tous les esprits, Noël a perdu de sa féerie cette année.
D’ordinaire, les chrétiens palestiniens des villes environnantes se seraient empressés de profiter des guirlandes lumineuses et de la foire de ce village de 5 000 âmes. Mais alors que la guerre fait rage dans la bande de Gaza et que la violence ne cesse de monter en Cisjordanie, la communauté chrétienne des alentours n’est pas d’humeur à célébrer Noël ce 25 décembre.
«Comment pouvons-nous le célébrer ?», s’interroge Nazrira Yousef Doueibes, 76 ans. La vieille dame, qui a vécu toute sa vie dans son petit village, n’a jamais connu une atmosphère aussi sombre. Ni sapin de Noël, ni joie à la maison. «Les gens ne se sentent pas en fête. Ils ont perdu des amis et des parents à Gaza», confie Nazrira Yousef Doueibes.
Plus de 300 Palestiniens tués depuis le 7 octobre en Cisjordanie
«L’occupation (Israël) détruit Jénine et des enfants sont brutalement tués». Très tôt le 25 décembre, des journalistes de l’AFP ont entendu des coups de feu et des sirènes retentir à Jénine, un bastion de la résistance contre l’occupation israélienne en Cisjordanie depuis 1967.
Plus de 300 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens et des attaques de colons en Cisjordanie depuis le 7 octobre et le début de la guerre entre le Hamas et Israël, selon des responsables palestiniens. L’armée israélienne affirme cibler des «terroristes», mais beaucoup de morts sont des civils, assure le ministère palestinien de la Santé.
Cette guerre a été déclenchée après l’attaque sanglante menée par des commandos du Hamas sur le sol israélien, faisant environ 1 140 morts, en majorité des civils, d’après les autorités israéliennes. En représailles, Israël a juré d’«anéantir» le Hamas, pilonnant la bande de Gaza, où plus de 20 400 personnes, en majorité des civils, ont été tuées, selon le gouvernement du Hamas.
«Nous avons plus que jamais besoin de paix»
Les violences quasi-quotidiennes en Cisjordanie ont des répercussions sur les moyens de subsistance des habitants. Dans les rues désertes de Zababdeh où l’on entend les pas claquer sur le pavé, la boutique de décoration de Gabi Khadar regorge d’invendus : guirlandes, boules de Noël et plus de 20 sapins en plastique.
Endetté, ce chrétien anglican de 55 ans ne sait pas comment il va pouvoir s’acquitter de son loyer. Bon gré mal gré, le commerçant a réduit les dépenses de Noël de sa famille. «Mon fils de 16 ans comprend», assure-t-il. «Il m’a dit qu’il n’avait pas besoin de nouvelles baskets pour Noël. Il pouvait se contenter des anciennes.»
Si le cœur n’est pas à la fête dans les villages de Cisjordanie, des messes de Noël ont tout de même eu lieu pour marquer l’unité au sein de la communauté. A l’église de la Visitation, des centaines de chrétiens palestiniens ont entonné des prières d’une même voix tandis que des effluves d’encens s’élevaient du lieu Saint. Ils sont «dévastés» par la guerre dans la bande de Gaza, explique le père Elias Tabban qui a célébré la messe de Noël.
Une femme de Zababdeh a perdu ses deux sœurs, leurs maris et leurs enfants, après une explosion dans une église orthodoxe à Gaza, a affirmé le prêtre selon lequel les fidèles vivent dans la crainte que leur village ne soit un jour atteint par les violences. «Tout le monde se demande : Quand est-ce notre tour ?», affirme le père Tabban. Mais pour l’homme d’Eglise, Noël offre surtout une occasion de se rassembler autour des Palestiniens dans le besoin et de prier pour la fin de la violence. «Nous avons plus que jamais besoin de paix».
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