Mark Rutte, Premier ministre des Pays-Bas, a présenté les excuses officielles du gouvernement pour le rôle de l'Etat néerlandais durant 250 ans d'esclavage. Certains les jugent insuffisantes, souhaitant notamment davantage d'actions concrètes.
Le Premier ministre des Pays-Bas Mark Rutte a présenté le 19 décembre à La Haye les excuses officielles du gouvernement pour le rôle de l’Etat néerlandais durant 250 ans d’esclavage, qu’il a qualifié de «crime contre l’humanité».
«Aujourd’hui, je présente des excuses au nom du gouvernement néerlandais pour les actions de l’Etat néerlandais dans le passé : à titre posthume à tous les esclaves du monde entier qui ont souffert de cet acte. À leurs filles et fils et à tous leurs descendants», a déclaré Mark Rutte.
«Nous ne pouvons que reconnaître et condamner l’esclavage dans les termes les plus clairs comme un crime contre l’humanité», a-t-il affirmé.
Au même moment, plusieurs de ses ministres étaient présents dans sept anciennes colonies, au Suriname et dans les Caraïbes, pour discuter de la question avec les habitants.
«Des personnes ont été transformées en marchandise. La dignité humaine a été foulée aux pieds, d’une manière horrible», a ajouté Mark Rutte, avant de dire «Je suis désolé» en anglais, en sranan (créole surinamien) et en papiamento (créole des Antilles néerlandaises). «Des siècles d’oppression et d’exploitation affectent le présent, dans les stéréotypes racistes, la discrimination et l’inégalité sociale», a-t-il ajouté.
Insuffisant, estiment des militants
«Je ne remarque pas grand-chose à propos d’actions des Pays-Bas et c’est dommage» a réagi auprès de l’AFP Iwan Wijngaarde, président de la Fédération des Afro-Surinamiens à Paramaribo.
«Ce qui manquait complètement dans ce discours, c’est la responsabilité et l’imputabilité» a déclaré à l’AFP Armand Zunder, président de la Commission nationale de réparation du Suriname, tout en relevant que la reconnaissance y était claire.
Le gouvernement a promis plusieurs événements de commémorations majeurs à partir de l’année prochaine, et annoncé un fonds de 200 millions d’euros destiné à des initiatives sociales.
«Nous pensons qu’à terme, il devrait y avoir un fonds qui se comptera en termes de milliards», a déclaré Armand Zunder.
Evelyn Wever-Croes, Première ministre d’Aruba, petite île des Antilles néerlandaises a salué un «tournant dans l’histoire du royaume» auprès de l’agence de presse néerlandaise ANP.
La Première ministre de Sint Maarten, Silveria Jacobs a regretté le 19 décembre des «excuses forcées» mais invité les Pays-Bas au dialogue. «Nous n’en sommes pas au stade où nous pouvons accepter ou rejeter les déclarations», a-t-elle déclaré à la radiodiffusion publique NOS.
L’esclavage a contribué à financer le «Siècle d’or» néerlandais, période de prospérité grâce au commerce maritime aux XVIe et XVIIe siècles. Le pays a procédé à la traite d’environ 600 000 Africains, principalement vers l’Amérique du Sud et les Caraïbes.
À l’apogée de son empire colonial, les Provinces-Unies, connues aujourd’hui sous le nom de Pays-Bas, possédaient des colonies comme le Suriname, l’île caribéenne de Curaçao, l’Afrique du Sud et l’Indonésie, où la Compagnie néerlandaise des Indes orientales était basée au XVIIe siècle.
L’esclavage a formellement été aboli au Suriname et dans d’autres territoires détenus par les Néerlandais le 1er juillet 1863, mais n’a vraiment pris fin qu’en 1873 après une période de transition de 10 ans.
Mark Rutte a longtemps émis des réserves quant à la présentation d’excuses officielles, affirmant par le passé que la période de l’esclavage était trop ancienne et que des excuses attiseraient les tensions dans le pays.
«J’avais tort», a-t-il reconnu le 19 décembre, même si selon un récent sondage à peine 38% de la population adulte était en faveur d’excuses officielles.
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