Les services fiscaux français ont renoncé à une procédure judiciaire contre le groupe de luxe LVMH. Une information révélée par Mediapart puis confirmée le 2 janvier par une source de l'AFP à Bercy. Cette annonce a fait, en France, grincer des dents à gauche.
Le 2 janvier, une source de l’AFP à Bercy a confirmé l’abandon d’une procédure judiciaire à l’encontre du groupe de luxe LVMH, «Moët Hennessy Louis Vuitton SE». Une information qui avait été révélée le 30 décembre par Mediapart.
Le groupe dirigé par Bernard Arnault avait fait l’objet d’une vaste opération du fisc français. Ce dernier avait dépêché, en septembre 2019, une soixantaine de ses agents dans plusieurs locaux de la société à Paris dans le cadre de soupçons de fraude fiscale concernant une filiale belge de LVMH.
Mais en 2020, la cour d’appel de Paris avait invalidé la perquisition et demandé à l’administration fiscale de restituer les pièces saisies, sans possibilité d’en garder copie. Une décision de justice elle-même cassée en février 2023 par la cour de cassation. Plusieurs années après avoir restitué les potentielles preuves, le fisc ne verrait pas d’intérêt à remettre le couvert.
«Plus d’effet de surprise»
«Ce type de procédure n’a d’intérêt que s’il y a un effet de surprise», a déclaré la source de l’AFP au sein de l’administration fiscale. Près de quatre années après les premières perquisitions, l’administration «risquait de ne pas retrouver les documents», a-t-elle poursuivi. «Cela nous semblait un peu vain.»
L’annonce de cet abandon de Bercy a provoqué des critiques à gauche de l’échiquier politique français. Dès la révélation de Mediapart le 30 décembre, des associations marquées à gauche ont dénoncé cette renonciation.
«Non seulement les milliardaires évadés fiscaux ne sont pas sanctionnés, mais ils sont récompensés. Bernard Arnault, paye tes impôts !», fustigeait sur X (anciennement Twitter) l’association Attac, repostant un article de la veille concernant l’élévation du patron de LVMH au rang de «Grand-Croix» de la Légion d’honneur.
De Patrick Pouyanné (Total) à Bernard Arnault (LVMH), l'année s'achève donc comme elle a commencé : la légion d'honneur à un évadé fiscal.
En France, ne payez pas vos impôts, vous serez honorés. https://t.co/xIFwLhyXoq
— Manon Aubry (@ManonAubryFr) December 31, 2023
Côté politique, peu de personnalités se sont manifestées, mais l’angle d’attaque demeurait le même. «En France, ne payez pas vos impôts, vous serez honoré», lâchait ainsi le 31 décembre sur X Manon Aubry. Dans son message, l’eurodéputée socialiste citait les noms de Patrick Pouyanné, PDG de Total, élevé en 2023 au grade d’officier de la Légion d’honneur.
En 2022, LVMH a opté pour un «partenariat fiscal» avec l’État. «Cela traduit la bonne volonté du groupe pour être plus transparent et nous soumettre des difficultés fiscales éventuelles liées à des opérations à venir», souligne la source de l’AFP. Selon elle, près de 70 grands groupes ont déjà engagé de tels partenariat avec l’administration fiscale.
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