La situation à Gaza était au menu du 33e sommet de la Ligue arabe, le 16 mai. Les 22 États arabes ont insisté sur l'importance d'un cessez-le-feu immédiat et du retrait des forces israéliennes. Ils ont également proposé l'envoi d'une force internationale jusqu'à ce que la solution à deux États soit mise en œuvre. Une idée rejetée par Washington.
Coup d’épée dans l’eau ou réel impact sur la situation à Gaza ? Telle est la question après le 33e sommet de la Ligue arabe qui a eu lieu dans la capitale de Bahreïn le 16 mai. Les 22 États arabes étaient réunis en présence notamment du prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, du roi de Jordanie Abdallah II, des présidents égyptien Abdel Fattah al-Sisi, irakien Abdel Latif Rashid et syrien Bachar al-Assad, ainsi que du chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres figurait également parmi les invités.
Selon le média panarabe Al-Qods al-Arabi, la déclaration adoptée à l’issue de cette rencontre condamne l’offensive israélienne sur Gaza, exige le retrait des forces de Tsahal de l’enclave gazaouie ainsi que la cessation des hostilités tant dans la bande de Gaza qu’en Cisjordanie.
De surcroît, les 22 pays arabes demandent la levée du siège de Gaza et l’ouverture des points de passage pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire, l’autonomisation des organisations des Nations unies, le rejet des déplacements forcés de toutes les parties des territoires occupés, la protection des civils et l’arrêt du terrorisme des colons. L’accent a également été mis sur le caractère sacré de Jérusalem et le rejet de sa judaïsation et enfin le soutien de la garde hachémite des lieux saints de Jérusalem.
Les États-Unis opposés à la proposition arabe
Fait notable dans cette déclaration, la volonté arabe de déployer des «forces internationales de protection et de maintien de la paix de l’ONU dans les territoires palestiniens occupés», jusqu’à ce que la solution à deux États soit mise en œuvre.
Un déploiement onusien auquel s’opposent les États-Unis. «Nous savons qu’Israël se concentre pour vaincre le Hamas», a déclaré plus tard dans la journée le porte-parole du département d’État américain, Vedant Patel, interrogé lors d’un point presse sur cette proposition des pays arabes. «Franchement, l’ajout de forces de sécurité supplémentaires pourrait potentiellement compromettre cette mission», a-t-il ajouté auprès des journalistes.
De surcroît, un tel déploiement ne pourrait se faire sans l’aval des autorités israéliennes, pour l’heure déterminées à poursuivre leur offensive à Rafah. «La bataille de Rafah est cruciale», a déclaré le 16 mai le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, lors d’un survol de Gaza en compagnie d’officiers généraux. «Il ne s’agit pas seulement du reste de leurs bataillons, mais aussi de leurs tuyaux d’oxygène qui leur permettent de s’échapper et de se réapprovisionner», a ajouté le chef du gouvernement israélien, cité par le média I24.
Autre fait marquant de la réunion de Manama, la déclaration finale demande à «toutes les factions palestiniennes à se joindre sous l’égide de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), le seul représentant légitime du peuple palestinien». Une manière, à peine voilée, de s’en prendre au mouvement islamiste du Hamas qui entretient des relations conflictuelles avec l’OLP.
Des pays arabes qui condamnent, mais ne sanctionnent pas
Le chef de l’Autorité palestinienne n’a pas manqué de s’en prendre directement au Hamas, en soulignant que l’attaque du 7 octobre avait fourni «des prétextes» à Israël pour bombarder la bande de Gaza. «L’opération militaire menée par le Hamas par décision unilatérale ce jour-là, le 7 octobre, a fourni à Israël davantage de prétextes et de justifications pour attaquer la bande de Gaza et procéder à davantage de meurtres, de destructions et de déplacements», a déclaré Mahmoud Abbas, dans des propos rapportés par Al-Hurra, une chaîne financée par le Congrès des États-Unis.
Une déclaration à laquelle le Hamas a réagi. «Nous exprimons nos regrets pour ce qui a été déclaré dans le discours du président de l’Autorité palestinienne […] à propos de l’opération héroïque Déluge d’Al-Aqsa et de la voie de la réconciliation interne, et nous affirmons que l’ennemi sioniste […] n’attend pas de prétextes pour commettre ses crimes contre notre peuple», a déclaré dans un communiqué le parti islamiste gazaoui, également cité par Al-Hurra.
Non convié à Manama, le Hamas a tenu à exhorter les pays arabes «à prendre les mesures nécessaires pour forcer l’occupation à mettre fin à l’agression, à retirer son armée de toute la bande de Gaza, y compris le passage de Rafah, à lever le siège, rapatrier les déplacés et procéder à la reconstruction».
En novembre dernier, lors d’un sommet à Riyad réunissant la Ligue arabe et l’Organisation de la coopération islamique, aucune mesure concrète n’avait été décidée malgré les condamnations des actions «barbares» de Tsahal à Gaza. Alors qu’une proposition libano-algérienne demandait à certains pays arabo-musulmans de stopper leur approvisionnement en pétrole de l’État hébreu, plusieurs pays s’y étaient opposés, dont les Émirats arabes unis et le Bahreïn, rapportait alors L’Orient-Le Jour.
Pour Haniyeh, le Hamas fera partie de l’équation d’après-guerre à Gaza