La présidente géorgienne Salomé Zourabichvili a annoncé le 18 mai opposer son veto à la loi sur les «agents de l’étranger», bien que la majorité dispose d'assez de voix pour passer outre son geste. Elle a regretté l'absence d'Emmanuel Macron à Tbilissi, indiquant l'avoir invité pour la fête de l'indépendance géorgienne, le 26 mai prochain.
«Aujourd’hui, je mets un veto (…) à la loi qui est russe dans son essence et qui contredit notre Constitution», a déclaré Mme Zourabichvili, dans une allocution télévisée.
Ce veto est toutefois hautement symbolique, car le parti au pouvoir «Rêve géorgien», à l’origine de la loi adoptée le 14 mai dernier, dispose d’assez de voix au Parlement pour passer outre ce geste de la chef de l’Etat, pro-européenne.
Zourabichvili a aussi demandé ce 18 mai au président français Emmanuel Macron de venir à Tbilissi pour «sortir définitivement le Caucase de l’influence russe». «Qu’ils viennent !», a-t-elle réclamé, à propos des dirigeants européens.
Zourabichvili, fille d’immigrés géorgiens installés en France ayant fui le rattachement de la Géorgie à l’URSS, est une ancienne diplomate française. Elle est devenue binationale en 2003, puis ministre géorgienne des affaires étrangères en 2005 sous la présidence du très atlantiste Mikheïl Saakachvili – président qui a poussé la Russie à intervenir militairement contre la Géorgie en 2008 pour protéger l’Ossétie du Sud.
Zourabichvili exige la présence de Macron à Tbilissi
«Emmanuel Macron m’a promis pratiquement depuis mon élection, en 2018, qu’il viendrait. Il faut qu’il le fasse avant le début de la campagne électorale (des législatives géorgiennes, ndlr) en septembre», a fait valoir Zourabichvili dans La Tribune Dimanche.
«Que la France ne soit pas présente, c’est une aberration. Je le dis en termes très clairs. J’ai écrit au président Macron, je l’attends pour la fête de l’indépendance de la Géorgie, le 26 mai», a précisé Zourabichvili. «Ce n’est pas seulement la Géorgie dont il est question, il s’agit de sortir définitivement le Caucase des mentalités du joug soviétique et de l’influence russe».
Le projet de loi sur les agents de l’étranger vise à obliger les médias et les ONG recevant plus de 20% de leur financement de l’étranger à s’enregistrer comme étant sous influence étrangère.
Rêve géorgien dit s’être inspiré… des États-Unis
Depuis un mois, les opposants au texte manifestent devant le Parlement, affirmant qu’il s’inspirait de la législation adoptée par Moscou en 2012. Du côté de Rêve géorgien, le parti au pouvoir, les architectes du texte affirment s’être inspirés de la loi américaine sur l’enregistrement des agents étrangers de 1938 (Foreign Agents Registration Act), dans une version bien moins stricte.
Les opposants au texte ont reçu le soutien de Bruxelles, où ce texte est jugé contraire aux aspirations d’adhésion de Tbilissi au bloc européen.
Du côté de Moscou, la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova avait dénoncé le 14 mai la «confusion bipolaire chronique» de la Commission européenne, soulignant que celle-ci envisageait d’adopter un texte analogue au sein de l’UE. Dans un article publié en mars dernier, où Rêve géorgien avait reculé face à la rue, Politico revenait sur des travaux de la Commission européenne sur une loi similaire. Citant notamment un haut fonctionnaire européen, le média faisait état de critiques quant au timing «maladroit» de l’exécutif, en raison des contestations en Géorgie.
Loi contre les agents de l’étranger : Washington menace Tbilissi de sanctions