La plainte accusant Eric Dupond-Moretti d'avoir profité de sa fonction de ministre pour régler des comptes qui dataient du temps où il exerçait comme avocat a été classée sans suite car les éléments pour la caractériser ont été jugés insuffisants.
La Cour de justice de la République (CJR) a classé une plainte d’un syndicat de magistrats qui reprochait à Eric Dupond-Moretti d’avoir profité de ses fonctions de ministre de la Justice pour inspecter la gestion d’une magistrate, a indiqué le 2 mai le parquet général de la Cour de cassation, confirmant une information de BFMTV. «L’infraction était insuffisamment caractérisée», a-t-il précisé.
Un premier litige datant de 2016
L’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) accusait le ministre d’être intervenu dans «le management de la cour d’appel de Cayenne», présidée par Marie-Laure Piazza, alors qu’un «grave incident» les avait opposés en 2016.
Le ministre de la Justice était alors avocat et Marie-Laure Piazza présidait la cour d’assises de Haute-Corse. Selon des sources judiciaires, Eric Dupond-Moretti avait notamment accusé la magistrate de partialité lors d’un procès, assurant disposer d’attestations de jurés critiquant sa façon de mener le délibéré.
L’enquête pour «acte d’intimidation envers un magistrat et violation et recel du secret du délibéré» s’était soldée par un rappel à la loi infligé à Eric Dupond-Moretti, aucun juré n’ayant confirmé ses accusations.
L’USM avait porté plainte fin mars pour «prise illégale d’intérêts» en s’appuyant sur l’examen de situation de la cour d’appel de Cayenne, demandé le 1er juillet par la directrice de cabinet du ministre à l’Inspection générale de la Justice (IGJ).
Un rapport a été rendu en décembre et le 24 janvier le cabinet du Premier ministre, en charge des affaires d’Eric Dupond-Moretti en lien avec ses anciens clients ou dans lesquelles il a été impliqué quand il était avocat, a demandé à l’IGJ l’ouverture d’une enquête administrative «sur les incidents et comportements de Mme Piazza», selon le syndicat.
L’examen de situation, qui est une «mission de conseil sur une courte durée», visait à «diagnostiquer d’éventuels dysfonctionnements dans un service et proposer des solutions opérationnelles», détaille le parquet général. Il ne s’agit pas d’une inspection de fonctionnement ou d’une enquête administrative et le nom de Marie-Laure Piazza n’a «jamais [été] visé dans la mission», précise-t-il.
Contacté par l’AFP, l’un des avocats du garde des Sceaux n’a pas souhaité commenter.
Eric Dupond-Moretti a été mis en examen pour prise illégale d’intérêts le 16 juillet 2021 dans une information judiciaire ouverte après une précédente plainte de l’USM et du Syndicat de la magistrature (SM, gauche) en décembre 2020. Il est soupçonné d’avoir profité de ses fonctions pour demander des enquêtes administratives sur quatre magistrats.
La CJR, seule habilitée à poursuivre des membres du gouvernement pour des faits commis dans l’exercice de leurs fonctions, a clos mi-avril ses investigations.
Nouvelle plainte d’un syndicat de magistrats contre Eric Dupond-Moretti pour «conflit d’intérêts»