Le gouvernement a confirmé que la haute juridiction administrative l'avait alerté du risque d'inconstitutionnalité de certaines des mesures contenues dans le texte de sa réforme controversée, mais reste confiant dans l'adoption du texte.
Le Conseil d’Etat a alerté le gouvernement d’un risque d’inconstitutionnalité de certaines mesures de son projet de réforme des retraites, notamment concernant l’index seniors, a confirmé l’exécutif ce 22 février.
La haute juridiction, lorsqu’elle a examiné le texte déposé par le gouvernement, a adressé à ce dernier une note, l’alertant sur certains points, selon des informations obtenues par l’AFP auprès de Matignon, confirmant celles du Point et du Monde. Le document a notamment été récupéré à Matignon par les députés Jérôme Guedj (PS) et Cyrille Isaac-Sibille (MoDem), en tant que co-présidents de la mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale.
L’exécutif a choisi comme véhicule législatif un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFSSR), qui lui offre certaines armes, notamment pour encadrer la durée des débats au Parlement grâce à l’article 47-1 de la Constitution, au grand dam des oppositions qui n’ont cessé de dénoncer un débat tenu dans des délais très réduits sur une réforme qui va avoir des conséquences d’importance sur la vie de nombreux Français.
En contrepartie, les mesures du texte sont supposées avoir un impact sur les finances actées par le budget de la Sécurité sociale pour 2023.
L’une des propositions pointées par le Conseil d’Etat est la création d’un index seniors (rejetée par l’Assemblée le 14 février) visant à mesurer l’emploi des salariés âgés par les entreprises. Des sanctions financières sont prévues en cas de non-publication de l’index.
Le Conseil d’Etat s’interroge sur l’impact du texte sur les finances publiques
Or, selon le Conseil d’Etat, l’effet attendu sur les finances publiques en 2023 est incertain, et la disposition pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel. Matignon estime cependant que la mesure «a sa place» dans le texte car «le produit de la pénalité viendra alimenter dès 2023 la Caisse nationale d’assurance-vieillesse».
L’exécutif pourrait toutefois la réintroduire dans un projet de loi consacré au «plein emploi» qu’il envisage au printemps. «Nous considérons que le texte a vocation à être valide du point de vue constitutionnel, je ne doute pas que des oppositions voudront saisir [le] Conseil constitutionnel pour vérifier», a déclaré ce 22 février le porte-parole du gouvernement Olivier Véran.
Autre point signalé par le Conseil d’Etat, l’annulation à partir de 2024 du transfert de recouvrement des cotisations du régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco à l’Urssaf. «Nous aurons la possibilité de l’intégrer dans le PLFSS [projet de loi de financement de la Sécurité sociale] pour 2024», estime Matignon.
Le Conseil d’Etat a également alerté sur des mesures d’accompagnement des contractuels titularisés dans la fonction publique, et pour des visites médicales pour certains salariés exposés à des facteurs de risque.
Plusieurs membres du gouvernement ont laissé entendre que certaines mesures, notamment sur l’emploi des seniors, pourraient figurer dans une autre loi. Le ministre du Travail Olivier Dussopt avait précisé que des propositions sur le travail de nuit et la pénibilité relèveraient «du niveau réglementaire». Il a également évoqué le PLFSS 2024 pour certaines mesures concernant les femmes, sans spécifier lesquelles.
L’examen de la réforme commencera au Sénat le 2 mars, les débats devant s’achever à la chambre haute le 11 mars. De leur côté, les syndicats ont appelé à mettre «la France à l’arrêt» le 7 mars pour faire barrage au projet.
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