Economie

L’Arabie saoudite envisagerait d’accepter le yuan au lieu du dollar pour ses ventes de pétrole

Les discussions concernant le paiement en yuan des exportations de brut saoudien se seraient accélérées à mesure que le mécontentement de Riyad à l'égard de Washington grandit. Une décision qui pourrait ébranler la domination du dollar américain.

Selon le Wall Street Journal, qui cite des sources proches du dossier, l’Arabie saoudite discuterait actuellement avec la Chine de la possibilité pour Pékin de payer ses achats de pétrole au royaume en yuans. Une hypothèse qui, si elle se concrétisait, pourrait inciter d’autres exportateurs à faire de même et viendrait ainsi ébranler la domination du dollar américain sur le marché pétrolier mondial.

Comme le précise le journal new-yorkais, Riyad et Pékin ont discuté de ce paiement en yuan par intermittence pendant six ans, mais les pourparlers à ce sujet se seraient intensifiés cette année. En cause : un mécontentement de l’Arabie saoudite concernant les négociations menées par les Etats-Unis sur le nucléaire iranien, ainsi que le manque de soutien, selon les Saoudiens, de Washington à l’opération militaire menée par le royaume au Yémen. Des responsables saoudiens auraient également déclaré avoir été choqués par le retrait précipité des Etats-Unis d’Afghanistan. Joe Biden avait par ailleurs déclaré lors de la campagne présidentielle américaine de 2020 que l’Arabie saoudite devrait être traitée comme un «paria» après le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi en 2018. 

Une collaboration croissante entre Riyad et Pékin

Le Wall Street Journal rappelle que la Chine achète plus de 25% des 6,2 millions de barils de brut exportés quotidiennement par l’Arabie saoudite.

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Au cours des dernières années, la Chine a aidé l’Arabie saoudite à construire ses propres missiles balistiques, a été consultée sur un programme nucléaire et a investi dans des projets tels que Neom, un projet de ville futuriste. 

Ce rapprochement avec Pékin survient alors que les relations économiques entre les Etats-Unis et l’Arabie saoudite sont en perte de vitesse : Washington faisant désormais partie des premiers producteurs de pétrole au monde, ses importations de brut saoudien sont passées de 2 millions de barils par jour au début des années 1990 à moins de 500 000 en décembre 2021, selon l’Energy Information Administration des Etats-Unis. Les exportations de pétrole du royaume vers la Chine augmentent en revanche depuis 30 ans, et l’Arabie saoudite était l’an dernier le premier fournisseur de brut de la Chine, suivie de la Russie avec 1,6 million de barils par jour, selon les données de l’Administration générale des douanes de Chine.

Un projet motivé par le gel des réserves de change de la Russie ? 

Rien ne dit cependant que l’Arabie acceptera les paiements en yuans, car cette petite révolution pourrait ébranler l’économie saoudienne, dont la monnaie – le riyal – est liée au dollar. Un haut responsable américain cité par le Wall Street Journal aurait ainsi qualifié l’idée de ventes de pétrole libellées yuans de «très volatile et agressive» et de «peu probable».

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Membre du conseil d’administration de Neom et ex-dirigeant d’un groupe de réflexion pro-saoudien à Washington, Ali Shihabi a quant à lui réagi comme suit à l’arrivée possible de «pétroyuans» en évoquant les sanctions prises par certains pays occidentaux contre la Russie à la suite de son intervention militaire en Ukraine : «Les sanctions valent mieux que la guerre, sans aucun doute, mais elles ont un prix et un impact à long terme qui ne sont peut-être pas immédiatement évidents pour les dirigeants politiques qui les imposent […] Le gel des réserves de change de la Russie a dû effrayer les Chinois (et les autres) qui détiennent des réserves massives en dollars. Tous les doutes que les pays avaient sur la nécessité de se diversifier en yuan et dans d’autres monnaies/géographies auraient pris fin avec ce pas de géant.»

A ce jour, environ 80% des ventes mondiales de pétrole se font en dollar, et l’Arabie saoudite vend son or noir exclusivement via le dollar depuis 1974, dans le cadre d’un accord passé avec l’administration Nixon comprenant des garanties de sécurité pour le royaume.




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