Alors que la coalition présidentielle a échoué à obtenir une majorité absolue dans l'hémicycle, la Nupes et le RN se positionnent comme les premières forces d'opposition. Mais LR pourrait bien être le juge de paix de la nouvelle chambre basse.
D’après les dernières estimations pour le second tour des législatives du 19 juin, la coalition présidentielle Ensemble! remporterait 247 sièges à l’Assemblée nationale, soit bien moins que les 289 nécessaires à l’obtention d’une majorité absolue. Un camouflet pour le président de la République, Emmanuel Macron, qui avait dans la semaine appelé de ses vœux à lui «donner une majorité solide» au palais Bourbon. Lors de la mandature précédente, le parti présidentiel, LREM, avait obtenu 308 députés, s’assurant à lui seul la majorité absolue (350 en comptant les alliances).
Législatives : Pas de majorité absolue pour Macron, la Nupes deuxième, percée du RN (EN CONTINU)
Signe de ce désaveu démocratique, trois membres du gouvernement récemment nommés par Elisabeth Borne ont échoué à se faire élire et devront, si la promesse d’Emmanuel Macron est respectée, quitter le gouvernement : Amélie de Montchalin, ministre de la Transition écologique, Brigitte Bourguignon, ministre de la Santé et Justine Benin, secrétaire d’Etat à la mer. Tous les autres membres du gouvernement ont eux obtenu un siège dans l’hémicycle, et donc le droit de rester au gouvernement. Le chef de file des députés LREM, et ancien ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a lui été battu dans sa circonscription des Alpes-de-Haute-Provence par le candidat de l’alliance de gauche, la Nupes, tout comme le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, dans le Finistère.
Prenant la parole dans la soirée, le Premier ministre, Elisabeth Borne, a annoncé qu’elle travaillerait «dès demain [20 juin] à construire une majorité d’action, il n’y pas d’alternative à ce rassemblement pour garantir à notre pays la stabilité et continuer les réformes nécessaires». Elle a ajouté que la France se trouvait dans «situation inédite […] [qui] constitue un risque pour notre pays».
La Nupes et le RN comme premières forces d’opposition
Derrière la majorité – relative – présidentielle, la Nupes obtiendrait 174 sièges. Un résultat salué par le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon. «La déroute du parti présidentiel est totale», a-t-il fait valoir, précisant avoir, selon lui, «réussi l’objectif politique que nous nous étions donnés en moins d’un mois : [..] faire tomber celui qui, avec autant d’arrogance, avait tordu le bras de tout le pays pour être élu sans qu’on s’ache pourquoi faire».
En troisième position, le Rassemblement national (RN) serait fort de 90 sièges, ce qui représenterait une percée importante après les résultats des législatives de 2017 (8 sièges). Le parti de droite radicale améliorerait même son meilleur score historique de 1986. A l’époque, et grâce à l’introduction de la proportionnelle, l’ancêtre du RN, le Front national, avait remporté 35 sièges.
Réélue dans sa circonscription du Pas-de-Calais, Marine Le Pen, ancienne candidate du parti à l’élection présidentielle, est apparue souriante à la tribune, promettant que le groupe parlementaire derrière elle incarnerait «une opposition ferme» mais «respectueuse des institutions».
Les Républicains comme arbitres du quinquennat ?
Reste l’inconnu des Républicains (LR). Si dans la soirée le maire LR de Meaux, Jean-François Copé, a tendu, une nouvelle fois, la main à Emmanuel Macron pour passer un «pacte de gouvernement» afin de «lutter contre la montée des extrêmes», le président du parti Christian Jacob s’est lui montré bien plus frileux à l’égard de cette initiative. «Nous sommes dans l’opposition, nous resterons dans l’opposition», a-t-il fait valoir.
Forte de 68 députés si les résultats venaient à se confirmer, l’alliance LR-UDI pourrait servir de variable d’ajustement à la coalition présidentielle afin de faire passer certaines réformes, comme par exemple celle des retraites, dont Emmanuel Macron a récemment rappelé qu’elle serait mise en place à l’été 2023.
LR doit tenir un bureau politique le 20 juin aux alentours de 14h afin de décider de la marche à suivre.
Quoiqu’il en soit, le pays apparait morcelé politiquement et personne ne peut prédire si Emmanuel Macron trouvera suffisamment de députés dans l’hémicycle pour faire voter ses textes. C’est la première fois depuis l’inversion du calendrier électoral, décidée en 2002 alors que Jacques Chirac était au pouvoir, et qui était censée donner systématiquement une majorité pour gouverner au président élu en rapprochant l’élection présidentielle et les élections législatives, que le chef de l’Etat échoue à obtenir le précieux sésame.
«Elle n’a pas de majorité» : Coquerel appelle le Premier ministre à la démission