L'ancien président ukrainien a confessé que les accords de Minsk, dont Moscou réclame l'application depuis plusieurs années, avaient servi à Kiev pour renforcer ses forces armées, et non pas pour mettre un terme au conflit dans le Donbass.
Pressée depuis plusieurs années par Moscou d’appliquer les accords de Minsk pour mettre fin au conflit dans le Donbass, l’Ukraine a-t-elle jamais eu l’intention de les mettre en œuvre ? A en croire une interview donnée par l’ancien président ukrainien Petro Porochenko, l’objectif poursuivi par Kiev était en fait, non pas de trouver une issue pacifique aux combats, mais bien de gagner du temps et de se renforcer en vue d’un affrontement avec la Russie.
Dans cet entretien donné le 15 juin à plusieurs médias dont Radio Svoboda (filiale de la station Radio Free Europe, financée par le Congrès des Etats-Unis), celui qui présidait l’Ukraine au moment de la signature des accords de Minsk s’est en effet livré assez ouvertement sur la manœuvre de Kiev.
«Nous avons réalisé la mise en œuvre de ce que nous voulions», a ainsi commenté Petro Porochenko, avant de poursuivre : «Nous ne croyions pas Poutine, comme nous ne le croyons pas aujourd’hui. Notre tâche était, tout d’abord, d’écarter la menace ou au moins de reporter la guerre [avec la Russie]. De nous assurer huit années pour pouvoir rétablir la croissance économique et renforcer les forces armées. C’était la première tâche, et elle a été accomplie.»
Paraphrasant le stratège chinois Sun Tzu, Petro Porochenko a développé : «La victoire la plus importante à la guerre n’est pas une victoire militaire, mais l’art d’éviter la guerre, [ce qui veut dire] que les accords de Minsk ont rempli leur tâche.»
«La question est de savoir s’il est même possible d’éviter la guerre avec Poutine. Je tiens à souligner que pendant les années de ma présidence, nous avons réussi à éviter l’escalade vers un conflit de grande ampleur. Je ne m’en attribue pas le mérite à moi seul, mais c’était une tâche très importante pour l’Ukraine», a encore déclaré le prédécesseur de Volodymyr Zelensky.
Le protocole de Minsk est un accord conclu le 5 septembre 2014 par les représentants de l’Ukraine, de la Russie et des Républiques populaires de Donetsk et Lougansk, qui avaient fait sécession, ne reconnaissant pas les autorités issues du coup d’Etat de 2014. L’accord, que les différentes parties s’accusent de ne pas avoir respecté, visait à mettre fin au conflit dans l’est de l’Ukraine entre Kiev et les Républiques autoproclamées.
Moscou a régulièrement accusé Kiev de ne pas avoir agi pour mettre en œuvre ces accords et reproché aux alliés occidentaux de l’Ukraine de ne pas avoir fait pression sur les autorités pour les pousser à respecter le texte. Le 24 février, la Russie a annoncé le lancement d’une opération militaire visant selon Vladimir Poutine à «démilitariser» et «dénazifier» l’Ukraine, afin de venir en aide aux populations du Donbass, régulièrement bombardées par Kiev depuis 2014. Moscou a également reconnu l’indépendance des deux Républiques du Donbass. De son côté, Kiev dénonce comme une invasion l’offensive militaire russe.
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