La sortie du film événement de Ridley Scott sur la vie de Napoléon Bonaparte a suscité de vifs débats en France. Les avis sont partagés mais les historiens semblent unanimes pour en relever les erreurs.
Ce film est-il un Austerlitz ou un Waterloo cinématographique ? C’est la question que se posent les curieux qui se demandent s’ils vont se rendre dans les salles obscures pour voir Napoléon de Ridley Scott. Le film a démarré sur les chapeaux de roue avec, pour son premier jour en salle, 120 000 spectateurs. Il n’en demeure pas moins l’objet de vives critiques de la part d’historiens et de passionnés de la vie de l’empereur, incarné ici par l’acteur Joaquin Phoenix.
Les scènes de bataille, «des bagarres entre bandes rivales»
«Joaquin Phoenix est un Napoléon un peu vulgaire, un peu grossier», a d’ailleurs taclé le directeur de la fondation Napoléon Thierry Lentz, pour qui ce film est une déception. Aussi cet historien a-t-il déploré dans les colonnes du Figaro que les scènes de batailles «ressemblent à des bagarres entre bandes rivales, dans le style de celles des Vikings de la série Valhalla». Il regrette par ailleurs «l’absence quasi-totale de personnages secondaires», avec un long-métrage qui se focalise sur les seuls personnages de Napoléon et de l’impératrice Joséphine.
En définitive, nombre d’historiens ont dénoncé les approximations historiques : Robespierre qui se suicide, Napoléon qui assiste à la décapitation de Marie-Antoinette, le bombardement des pyramides lors de la campagne d’Egypte, la présence de tranchées façon Grande Guerre à Waterloo, et même la charge de Napoléon durant cette bataille finale.
Le spécialiste de Napoléon Georges Mourier se montre moins sévère sur France Info et estime : «On ne pourra vraiment juger le film qu’une fois qu’on aura vu la version longue.» Pour le journal L’Humanité, très hostile à la figure de Napoléon, la critique est des plus rudes et le journaliste Cyprien Caddeo dépeint un film qui, «à trop vouloir cocher les cases du roman napoléonien, dévitalise son sujet».
Sur les réseaux sociaux, les commentaires des youtubeurs spécialisés dans le cinéma sont assez négatifs, à l’image de Christopher Lannes, créateur d’une chaîne consacrée à l’histoire et au cinéma, qui dit avoir un «avis assez mitigé» sur le film sur les ondes de Radio Courtoisie.
Ridley Scott a lui déjà répondu aux critiques sur la BBC en estimant notamment que «les Français ne s’aiment pas eux-mêmes». Dans le Times, il avait par ailleurs estimé qu’il n’avait pas eu besoin d’historiens pour réaliser son film, avant d’ajouter à propos de l’empereur : «Franchement, c’était un sacré enfoiré.»
Le conseiller de Ridley Scott défend la «licence cinématographique»
Le conseiller historique du film, l’historien français Lorris Chevalier, a tenu à relativiser les approximations en expliquant dans un entretien au Figaro : «Il faut aussi accepter les détails qui ne sont pas historiques, car cela reste un film.» Et d’ajouter que Ridley Scott ne voulait pas d’un conseiller historique «trop académique». «Au même titre que l’on parle de licence poétique, on parle aussi de licence cinématographique», défend ce jeune historien de 29 ans.
#Napoleon prend la tête du box-office France lors de son 1er Jour au cinéma. cc @SonyPicturesFrhttps://t.co/Gkti846dF9
— Le Box-Office des films en France et dans le Monde (@boxofficefr) November 23, 2023
Avec près de 122 000 entrées le premier jour, le film s’est placé en tête du box-office, loin devant ses poursuivants, Rien à perdre et ses 15 000 entrées et Mars Express avec 10 000 tickets vendus. Ce succès cache néanmoins une réception assez négative par les spectateurs avec une note moyenne qui se situait ce 24 novembre à 2,6 sur le site de référence Allo Ciné, ce qui est la moins bonne note d’un film de Ridley Scott.
Oui, Napoléon fait partie de notre ADN, arrêtons l’autoflagellation et redressons la tête !