L'ancien chancelier conservateur autrichien Sebastian Kurz a été reconnu coupable de faux témoignage, ce 23 février, au terme d'un procès où il était accusé d'avoir menti devant une commission parlementaire.
«Sebastian Kurz est coupable», a déclaré ce 23 février le juge à Vienne en condamnant l’ancien chancelier autrichien à 8 mois de prison avec sursis en première instance, suivant ainsi la réquisition du parquet. Auparavant, lors de sa dernière déclaration, l’ancien chef de gouvernement âgé de 37 ans – qui peut faire appel – avait dit s’être senti «désarmé» et «très mal» d’être accusé, assurant n’avoir jamais eu l’intention de mentir.
Tout au long des douze jours d’audience, cet ancien prodige de la politique, reconverti consultant dans le privé, a clamé son innocence, blâmant procureurs et adversaires pour ses déboires judiciaires. «On a voulu me détruire», a-t-il lâché.
Devenu à 31 ans en 2017 le plus jeune dirigeant élu de la planète, avant de se retirer avec fracas à l’automne 2021, il lui était reproché d’avoir menti devant une commission parlementaire.
«J’étais informé, mais ce n’est pas moi qui ai décidé»
Premier chancelier sur les bancs de la justice en plus de 30 ans, Sebastian Kurz a réfuté avoir «sciemment» trompé les députés quand ils l’ont interrogé en 2020 sur son rôle dans la nomination d’un proche, Thomas Schmid, à la tête d’une très puissante holding publique.
«J’étais informé, mais ce n’est pas moi qui ai décidé», a-t-il dit, alors que le parquet l’a au contraire dépeint comme contrôlant tout dans sa formation politique, s’appuyant en particulier sur de nombreux SMS passés à la loupe. En Autriche, intervenir dans un processus de nomination ne constitue pas un délit en soi, mais dissimuler la vérité alors que l’on est interrogé sous serment est passible de trois ans de prison.
Les témoins convoqués – une dizaine au total, dont d’anciens ministres – ont pour la plupart défendu sa version des faits. À l’exception toutefois du principal protagoniste : Thomas Schmid, l’ex-ami qui coopère désormais avec la justice dans l’espoir d’une remise de peine. Il l’a accablé au cours d’une audition de deux jours, évoquant «un système Kurz», pour dire que celui-ci aimait intervenir dans les nominations.
En vue de le discréditer, Sebastian Kurz a fait appel à deux hommes d’affaires russes et le dernier jour du procès a commencé par le témoignage du second d’entre eux, qui s’exprimait par vidéo depuis l’ambassade d’Autriche à Moscou. «Un acte final grotesque», selon le quotidien Der Standard: le premier avait déjà laissé l’audience perplexe en déclarant que l’avocat du prévenu l’avait aidé à rédiger sa déclaration.
Soupçons de détournement de fonds publics
Sebastian Kurz «ne ressort pas grandi de la manière dont il s’est comporté pendant le procès», estime l’analyste politique Thomas Hofer, interrogé par l’AFP. «Il a agi comme un politicien obsédé par son image publique, qui n’a pas vraiment su s’adapter au tempo du tribunal».
Outre ce procès, l’ex-dirigeant est soupçonné d’avoir détourné des fonds publics pour commander des enquêtes d’opinion truquées et s’assurer d’une couverture élogieuse dans des tabloïds, au gré de sa fulgurante ascension. Pour ce volet corruption, l’enquête est toujours en cours.
Autant d’affaires découlant du retentissant scandale dit de l’«Ibizagate». En 2019, une vidéo réalisée en caméra cachée sur l’île espagnole d’Ibiza à l’occasion de vacances de responsables autrichiens a révélé des pratiques potentiellement frauduleuses dans la classe politique.
Dans ces conditions, Thomas Hofer n’envisage pas dans un avenir proche un retour de Sebastian Kurz sur les devants de la scène politique. Certains pourtant l’auraient bien vu sauver son ancien parti (ÖVP), qui peine dans les sondages, loin derrière l’extrême droite, donnée en tête aux législatives, prévues pour fin septembre.
Lui-même nie toute ambition, préférant multiplier les lucratives collaborations internationales dans le secteur privé, notamment dans les cercles proches de Donald Trump.
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