La patronne de France Médias Monde dit avoir été surprise par la censure de RT par des «démocraties occidentales», à l'heure les chancelleries concernées se veulent pédagogues en matière de liberté d'expression à travers le monde.
«[Le fait que] des démocraties occidentales, au titre de sanctions dans un environnement guerrier, sortent les premières l’arme de la censure, ça m’a surprise […]. C’est pas très commode à l’international ensuite d’expliquer la liberté d’expression», a déclaré le 9 février Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde, groupe public chargé de l’audiovisuel extérieur de la France.
[Le fait que] des démocraties occidentales, au titre de sanctions dans un environnement guerrier, sortent les premières l’arme de la censure, ça m’a surprise
Lors d’un déjeuner de presse organisé à Paris par l’Association des journalistes médias (AJM, qui réunit des journalistes couvrant ce secteur), la haute fonctionnaire française a considéré que cette censure était «une décision européenne dépass[ant] la France», rappelant que l’interdiction de diffusion appliquée à RT sur le sol européen avait été mise en place dans le cadre de sanctions antirusses décidées à l’échelle de l’UE.
«Ma surprise ne portait pas sur l’opportunité de la coupure de RT, qui de toute évidence n’est pas une chaîne répondant aux mêmes principes déontologiques et de liberté de la presse que les nôtres. Je regrettais que la chronologie des événements ait permis que cet argument nous soit renvoyé au Mali pour justifier la coupure, sans fondement cette fois, de nos médias indépendants et de service public», a cependant nuancé la patronne de FMM, faisant donc apparemment peu de cas du professionnalisme et de l’attachement à leur éthique des journalistes de la rédaction française de RT, qui figurent pourtant en première ligne face aux sanctions appliquées à leur média.
Près d’un an de censure
Pour rappel : peu après le déclenchement de l’opération militaire russe en Ukraine fin février 2022, la Commission européenne avait invoqué la nécessité de couper tous les canaux de diffusion (satellite, Web et réseaux sociaux) en Europe de «la machine médiatique du Kremlin» représentée, selon elle, par RT et Sputnik. Or, l’UE n’a pas été en mesure, pour appuyer cette décision, de citer la moindre fake news dont se seraient rendus coupables ces médias. Et pour cause : la chaîne RT France n’a jamais été sanctionnée par le régulateur français des médias, l’Arcom (ex-CSA).
Par la suite, en décembre 2022, l’UE a adopté un paquet de sanctions anti-russes visant notamment la maison-mère de RT France, TV-Novosti. Le mois suivant, le Trésor public français a invoqué ces sanctions pour justifier un gel des comptes de RT France, compromettant la poursuite de l’activité journalistique de l’entreprise.
«Censure d’un autre âge» : indignation après le gel des comptes de RT France