Lors d'un entretien à l'initiative d'Emmanuel Macron, le président russe a dénoncé les «bombardements systématiques par les militaires ukrainiens» du site nucléaire. Ils se sont entendus sur l'importance d'une mission prochaine de l'AIEA.
Au cours d’un entretien téléphonique ce 19 août, le président russe Vladimir Poutine a mis en garde son homologue français quant à la possibilité d’une «catastrophe de grande envergure» à la centrale nucléaire de Zaporojié, en Ukraine. Ce site a fait l’objet de récents bombardements dont Moscou et Kiev s’accusent et Moscou avait dernièrement accusé les forces ukrainiennes de préparer une «provocation» sur place durant la visite en Ukraine du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.
Macron et Poutine favorables à une mission de l’AIEA
Selon le compte-rendu du Kremlin, qui précise que la discussion a eu lieu à l’initiative du président français, les deux dirigeants se sont entendus sur l’importance d’envoyer sur le site de la plus grande centrale nucléaire d’Europe une mission de l’Agence internationale de l’Energie atomique (AIEA) «dans les plus brefs délais». Vladimir Poutine a assuré à son homologue que la partie russe était prête à fournir aux inspecteurs l’assistance nécessaire. L’Elysée a pour sa part précisé qu’Emmanuel Macron avait spécifié que l’envoi d’inspecteurs de l’AIEA devait se faire dans des «conditions agréées par l’Ukraine et les Nations unies».
Les bombardements systématiques par les militaires ukrainiens du territoire de la centrale nucléaire (…) créent le danger d’une catastrophe de grande envergure qui pourrait entraîner une contamination radioactive de vastes territoires
Le chef d’Etat russe a averti son homologue quant aux «bombardements systématiques par les militaires ukrainiens du territoire de la centrale nucléaire», qui créent selon lui le «danger d’une catastrophe de grande envergure qui pourrait entraîner une contamination radioactive de vastes territoires».
Après une série de bombardements qui se sont abattus ces dernières semaines sur le site de la centrale nucléaire de Zaporojié, une région partiellement sous contrôle russe, le ministère russe de la Défense avait accusé Kiev ce 18 août de préparer une «provocation retentissante» sur ce site pendant la venue du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres en Ukraine.
Selon le ministère, des unités d’artillerie ukrainiennes prévoyaient ainsi de tirer sur la centrale nucléaire de Zaporojié «pour ensuite accuser la Russie de provoquer une catastrophe technologique à cette centrale», et cela afin de pousser à une zone d’exclusion aérienne dans la zone.
De son côté, Kiev accuse Moscou d’utiliser le site de la centrale comme une base de tir, ce que les forces russes démentent, affirmant qu’elles ne font que le sécuriser. Après des frappes ces derniers jours, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait estimé dans un message vidéo le 11 août qu’il fallait «chasser les occupants de la centrale de Zaporojié» et que «seuls le retrait total des Russes et la reprise du contrôle total de l’Ukraine sur la centrale garantiraient la sécurité nucléaire pour toute l’Europe».
L’ONU veut éviter la mise à l’arrêt de la centrale
La Défense russe a pour sa part fait savoir le 18 août qu’elle n’excluait pas de mettre à l’arrêt la centrale «en cas d’évolution négative de la situation à cause des bombardements ukrainiens».
Une option que ne souhaite pas voir se réaliser Antonio Guterres, qui a demandé le 19 août à Moscou de ne pas couper la centrale. «Bien évidemment, l’électricité de Zaporojié est une électricité ukrainienne […] ce principe doit être pleinement respecté», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse en marge de sa rencontre avec les présidents Volodymyr Zelensky et Recep Tayyip Erdogan.
Le secrétaire général de l’ONU avait estimé un peu plus tôt que «tout dégât potentiel à Zaporojié serait un suicide» et avait appelé à démilitariser le territoire de la centrale.
La crise alimentaire et les exportations également évoquées
Lors de l’échange avec le président français, Vladimir Poutine a par ailleurs dénoncé les «obstacles» aux exportations de produits russes, ce qui ne favorise pas selon le dirigeant «la résolution des objectifs de garantie de la sécurité alimentaire mondiale». Il a également «informé son homologue français de la mise en œuvre de l’ensemble des accords signés le 22 juillet à Istanbul sur les exportations de céréales ukrainiennes depuis les ports de la mer Noire et sur les exportations de produits et d’engrais russes vers les marchés mondiaux».
Vladimir Poutine a enfin souligné que des experts de l’ONU et la Croix-Rouge avaient été «invités à visiter le centre de détention provisoire à Elénovka où un grand nombre de prisonniers de guerre ukrainiens détenus ont été tués à la suite de la frappe aérienne effectuée par les forces armées ukrainiennes».
Les deux présidents, qui ne s’étaient plus appelés depuis le 28 mai, ont prévu de se reparler dans les prochains jours.
«Tout dégât» à la centrale nucléaire de Zaporojié serait «un suicide», alerte Antonio Guterres