Un député socialiste a pointé du doigt le risque pour une salariée occupant un métier pénible et occasionnant des problèmes de dos de faire deux années de plus. Une élue macroniste a formulé une réponse qu'il a jugée pour le moins… technocratique.
Le 1er février en commission des Affaires sociales, le député du Parti socialiste (PS) Arthur Delaporte a tenté d’interpeller les promoteurs de la controversée réforme des retraites en évoquant le cas d’une aide à domicile nommée Angélika après avoir défendu l’intégration d’un amendement portant sur «l’usure professionnelle».
«[Angelika], a le dos en compote mais elle n’arrive pas à faire reconnaitre cela comme une maladie professionnelle, pourquoi ? Parce qu’elle porte des gens et elle se brise le dos. Et malheureusement vous avez supprimé ces critères [de pénibilité] avec votre réforme de 2017 […]. Vous nous empêchez de faire en sorte que des gens comme Angélika puissent avoir des droits supplémentaires à la retraite. C’est malheureux et nous le dénonçons», a-t-il cinglé.
En réponse, l’élue et rapporteure générale Stéphanie Rist (Renaissance) a dit entendre l’inquiétude de cette salariée. Soulignant au passage qu’elle était rhumatologue de profession, elle a assuré que la nouvelle réforme des retraites allait lui apporter un «droit effectif». Stéphanie Rist évoque ainsi un fonds d’investissement dédié d’un milliard d’euros afin de «permettre aux entreprises de mieux adapter l’environnement au travail […] des congés payés pour reconversion [et] un suivi individuel de prévention».
Je suis hors de moi
«Ce que vous voyez dans le mal de dos, ce n’est pas une fatalité», a-t-elle soutenu, avant d’argumenter : «Quand on fait de la prévention et quand on peut avoir une activité physique éventuellement adaptée, cela permettra à cette dame, forcément inquiète qu’on lui dise qu’elle va avoir deux ans de plus à travailler… Eh bien avec ces mesures, elle arrivera peut-être en travaillant un peu plus, un peu plus longtemps, mais avec un dos qui lui fait moins mal.»
Excédé par cette intervention, Arthur Delaporte a ainsi rétorqué : «Quand je vous parle d’Angelika et que vous me dites qu’elle pourra travailler un peu plus longtemps, avec un dos qui lui fait moins mal parce que vous aurez créé [avec l’] article 9 un fonds d’investissement dans la prévention, je suis hors de moi. Parce qu’Angelika a déjà son dos de brisé […] Vous ferez la prévention que vous voudrez, cela ne va pas lui remettre son dos droit».
J'ai demandé à En Marche comment une aide à domicile, Angélika, pouvait travailler jusqu'à 64 ans avec le dos brisé.
Leur réponse m'a fait bondir ⤵️#ReformeDesRetraitespic.twitter.com/yK6chOAMUe
— Arthur Delaporte (@ArthurDelaporte) February 3, 2023
Ping-pong sur la pénibilité
Stéphanie Rist a ensuite justifié son argumentaire en affirmant que si cette aide à domicile avait un «dos brisé», et se trouvait donc en incapacité à poursuivre son travail, elle pourrait partir avant 64 ans. «Nous ne bougeons pas l’âge de départ des gens en incapacité», a-t-elle fait valoir.
Le député de La France insoumise (LFI) François Ruffin a renchéri en demandant du «sérieux» de la part de la rapporteure : «On est en train de parler de dizaines de milliers d’auxiliaires de vie, de chefs de rayon en série, de travailleurs du bâtiment par milliers, et vous nous répondez [qu’il] y aura un fonds de prévention machin bidule.»
Rejetée par une majorité de Français, la très contestée réforme des retraites, dont l’examen a débuté le 30 janvier en commission des Affaires sociales à l’Assemblée nationale, prévoit un recul de l’âge légal de 62 à 64 ans et une accélération de l’allongement de la durée de cotisation, au grand dam des syndicats qui, après avoir organisé une nouvelle journée de mobilisation le 1er février, entend maintenir la pression sur l’exécutif avec une nouvelle journée d’action le 7 février.
Polit’Mag – Manifestation historique en France : Emmanuel Macron battu en retraite ?