Le courant progressiste des démocrates a demandé au président américain d'accroître les efforts diplomatiques pour trouver une issue rapide au conflit ukrainien. L'exécutif a fait savoir qu'il n'en ferait rien sans l'assentiment de Kiev.
Des élus de l’aile gauche du Parti démocrate américain ont demandé, dans une lettre adressée le 24 octobre au président Joe Biden, qui a débloqué près de 30 milliards de dollars d’aide militaire à l’Ukraine face à l’offensive russe, de démultiplier les efforts diplomatiques et d’engager des pourparlers directs avec Moscou afin de parvenir à une sortie du conflit, entamé depuis huit mois. C’est la première fois qu’un tel appel émane du propre parti du président. Parmi les signataires figurent Alexandria Ocasio-Cortez, Ilhan Omar et Pramila Jayapal, figures de la frange la plus progressiste du parti.
«Un nouvel accord de sécurité européen acceptable pour toutes les parties»
«Nous vous appelons à accompagner le soutien économique et militaire que les Etats-Unis ont fourni à l’Ukraine d’une impulsion diplomatique proactive, et à redoubler d’efforts pour chercher un cadre réaliste pour un cessez-le-feu», écrivent les élus dans leur missive, en se positionnant clairement contre l’intervention russe, qu’ils dénoncent comme une «invasion illégale et scandaleuse» de l’Ukraine.
«En tant que législateurs responsables de la manière dont sont dépensés des dizaines de milliards de dollars du contribuable américain en assistance militaire dans le conflit, nous pensons qu’une telle implication dans cette guerre crée également la responsabilité pour les Etats-Unis de sérieusement explorer toutes les voies possibles», poursuivent-ils.
Inquiets de voir le conflit dégénérer et de le voir emprunter le chemin d’une «escalade catastrophique», ils évoquent aussi les conséquences mondiales de l’affrontement entre Kiev et Moscou, qu’il s’agisse de la crise alimentaire ou de l’explosion des prix de l’énergie. «Le conflit menace […] des dizaines de millions de personnes à travers le monde», alertent-ils.
Par conséquent, les élus démocrates ont appelé Joe Biden à «déployer de vigoureux efforts diplomatiques en soutien à un règlement négocié et à un cessez-le-feu, à engager des pourparlers directs avec la Russie [et] à explorer les perspectives pour un nouvel accord de sécurité européen acceptable pour toutes les parties».
Washington veut que Kiev participe à toute éventuelle négociation en position de force
Interrogé sur le courrier, le porte-parole du département d’Etat, Ned Price, a affirmé que «personne ne veut voir cette guerre se terminer plus que nos homologues ukrainiens», tout en renvoyant à Moscou la responsabilité d’entamer des discussions. «Nous ne savons pas quand cela se produira […], parce que nous n’avons vu aucune indication de la part des Russes disant qu’ils sont prêts à s’engager dans cette diplomatie et ce dialogue», a-t-il ajouté. «Nous fournissons à nos partenaires ukrainiens ce dont ils ont besoin sur le champ de bataille pour que, lorsqu’une table de négociations fera son apparition, ils soient dans la position la plus forte possible», a-t-il développé.
La porte-parole de la Maison Blanche Karine Jean-Pierre a quant à elle été droit au but, indiquant que l’exécutif avait été «très clair» et s’en tenait à son mot d’ordre «Rien sur l’Ukraine sans l’Ukraine». Un point confirmé par le porte-parole du Conseil national de sécurité, John Kirby, selon qui les Ukrainiens devront faire partie de toute négociation future. «Nous n’allons pas avoir de discussions avec les dirigeants russes sans que les Ukrainiens soient représentés», a-t-il justifié. Selon le porte-parole, le président ukrainien Volodymyr Zelensky «a le droit de déterminer – parce que c’est son pays – à quoi ressemble le succès et quand négocier».
Le souhait de respecter les volontés de Kiev n’est d’ailleurs pas contesté par les auteurs de la lettre mais ces derniers invitent Joe Biden à prendre du recul sur sa stratégie et à considérer l’ensemble des répercussions du conflit. Ils rappellent d’ailleurs que le président ukrainien lui-même avait affirmé à plusieurs reprises que seule la voie diplomatique permettrait de sortir de la crise, avant de durcir ses positions au cours de l’été et de signer un décret début octobre officialisant l’impossibilité de tenir des pourparlers avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier avait réaffirmé, mi-octobre, que la Russie avait ouvert la porte à des discussions, mais que Kiev avait perdu toute «envie de négocier».
Depuis le début du conflit, l’administration de Joe Biden a déversé selon le Kiel Institute 50 milliards de dollars d’aide militaire, humanitaire et financière sur l’Ukraine, avec l’accord des deux partis au Congrès, bien qu’une partie de l’aide droite des républicains ait aussi protesté. Un influent élu républicain a récemment prévenu que son parti ne signerait pas de «chèque en blanc» à l’Ukraine s’il remporte, comme les sondages le prédisent, la majorité des sièges de la Chambre des représentants aux élections de mi-mandat, prévues le 8 novembre.
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