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RN : Bardella défend le retour à une «souveraineté pleine et entière de l’Ukraine» et blâme Poutine

Dans une interview à L'Opinion, le président du RN a dit regretter une «naïveté collective» à l’égard des ambitions du président russe et prend le parti de Kiev, maintenant cependant des réserves sur les livraisons d'armes afin d'éviter «l'escalade».

Une évolution complètement assumée. Dans un entretien à L’Opinion mis en ligne le 22 février, le président du Rassemblement national (RN) Jordan Bardella prend clairement le parti de l’Ukraine en estimant qu’il n’y aura pas d’issue au conflit «sans le retrait des troupes russes et sans le retour à une souveraineté pleine et entière de l’Ukraine», tout en déplorant une forme de «naïveté collective» qui aurait eu cours au sein de la droite française à l’égard des «ambitions de Vladimir Poutine».

Interrogé sur sa présence remarquée au Parlement européen le 9 février, lorsque le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est adressé aux députés et a reçu les ovations de l’ensemble de l’Hémicycle – élus du RN compris, sauf Thierry Mariani, absent –, Jordan Bardella a expliqué : «C’était ma place de député européen et de chef de parti que d’assister au discours d’un chef d’Etat en guerre aux frontières de l’Union européenne, à trois heures de vol de Paris».

Jordan Bardella (image d'illustration).

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D’après le président du RN, ce soutien affiché à Kiev aux côtés des autres forces politiques «ne sous-entend pas l’approbation totale des discours» prononcés ce jour, qu’il s’agisse de celui de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ou de celui de Volodymyr Zelensky, ce dernier étant appelé à «rester un interlocuteur de la France dans les années qui viennent».

Le Vladimir Poutine d’il y a cinq ans n’est pas celui qui, cinq ans plus tard, décide d’envahir l’Ukraine et de commettre des crimes de guerre

Sur le fond, le bras droit de Marine Le Pen a réaffirmé «une condamnation très claire, franche, et sans aucune retenue» de l’offensive russe, une «agression» qui viole «le droit le plus légitime d’un Etat, celui de son intégralité territoriale et de sa souveraineté». Le corpus du RN ne ferait que justifier cette position dans la mesure, où, selon Jordan Bardella, «on ne peut pas être patriote et souverainiste et être insensible à la violation de la souveraineté d’un Etat européen».

Et si le RN avait exprimé des sympathies à l’égard de Moscou par le passé, tout en ayant été accusé d’avoir reçu des financements russes, la situation a bien changé depuis l’entrevue entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine en 2019. «Le Vladimir Poutine d’il y a cinq ans n’est pas celui qui, cinq ans plus tard, décide d’envahir l’Ukraine et de commettre des crimes de guerre à Odessa ou à Marioupol», avance ainsi Jordan Bardella, estimant que sa famille politique n’a pas décelé la «volonté expansionniste» de Moscou suffisamment en amont.

Favorable à des livraisons d’armes «défensives», le RN veut éviter l’escalade

S’agissant des discussions sur les armements que les Occidentaux livrent régulièrement à Kiev et que critique la Russie, le patron du RN se dit favorable à l’envoi de «matériel défensif», à savoir «des munitions, des systèmes de défense anti-aériens, du matériel anti-char et des véhicules blindés d’infanterie», en exprimant à l’inverse ses «plus grandes réticences sur l’envoi d’avions, de chars d’assaut et plus largement de missiles longue portée», autant d’équipements réclamés par Kiev à l’Occident. Il est ainsi hors de question de fournir à l’Ukraine des «missiles qui pourraient toucher Rostov ou Sebastopol», car cela reviendrait à ouvrir «les portes de l’escalade», selon la formule de Jordan Bardella. Ce dernier affirme néanmoins que «le soutien moral, politique et matériel à l’Ukraine relève […] de l’évidence» et que les pays européens, dont la France, ont «une proximité culturelle avec l’Ukraine».

Plus globalement, le président du RN estime que la Russie «a pu être par le passé un partenaire sur un nombre de domaines» de Paris, mais que cette page semble définitivement tournée, notamment compte tenu de la stratégie de Moscou en Afrique, continent où Paris accumule les revers, dont un récent au Burkina Faso. Sans accorder un satisfecit au président Emmanuel Macron, qui «a renoncé à défendre les intérêts stratégiques» du pays selon lui, Jordan Bardella évoque «une guerre d’influence et d’intérêts directe avec la Russie», qualifiée de pays «concurrent» et d’«adversaire dangereux».

«Faux opposant», «opportunisme spectaculaire» : la classe politique réagit

L’interview du président du RN et sa référence à «une naïveté collective» n’est pas passée inaperçue : le souverainiste François Asselineau a fustigé sur Twitter une reprise «mot à mot» du «narratif américano-européen» sur le conflit et qualifié le RN de «faux opposant».

«Voir un parti qui se dit “national, souverainiste” se rallier à 100% […] au narratif atlantiste sur l’Ukraine est affligeant !», a pareillement blâmé le leader des Patriotes Florian Philippot (lui-même ex-bras droit de Marine Le Pen), estimant que «ça ne pouvait qu’arriver après avoir renoncé à sortir de l’UE, l’OTAN, etc.».

L’eurodéputée macroniste Nathalie Loiseau a pour sa part estimé que «le revirement de Jordan Bardella sur l’Ukraine est d’un opportunisme spectaculaire» et qu’«il essaye de prendre le sens du vent». 

«Non il n’y a pas eu de naïveté collective. Mais une complicité active. Celle de votre parti avec le régime de Poutine», a blâmé de son côté le secrétaire général du parti présidentiel, Stéphane Séjourné. «Le RN nous joue une nouvelle fois sa carte des résistants de [19]45 !», a quant lui ironisé sur France Inter le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, voyant dans cette évolution un pur opportunisme, dans la mesure où «leur propre électorat s’est détourné du camp russe».

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