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Guerre en Ukraine : selon des officiers ukrainiens, «le risque est grand que les lignes de front cèdent»

Dans un article de Politico paru le 3 avril, des officiers ukrainiens ont fait part de leurs craintes d'une possible rupture du front en cas d'offensive russe. L'Ukraine fait face à une double pénurie d'hommes et de matériel.

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«Il n’y a rien désormais qui puisse aider l’Ukraine car aucune technologie ne permet de faire face aux troupes massives que la Russie va probablement faire déferler sur nous», a confié un officier ukrainien souhaitant rester anonyme à Politico dans une enquête publiée le 3 avril.

Ils sont ainsi plusieurs hauts gradés du régime de Kiev ayant servi sous les ordres du général Zaloujny – remplacé le 8 février par le général Syrsky – à avoir fait part de leur pessimisme quant aux prochaines évolutions du front. 

Leurs inquiétudes font écho à l’interview de Volodymyr Zelensky du 29 mars au Washington Post, qui déclarait qu’en cas d’absence de soutien de la part des États-Unis, faute de défense aérienne, de missiles Patriot, de brouilleurs et d’obus d’artillerie, l’Ukraine devrait «reculer, battre en retraite, peu à peu, par petits pas». Il a en outre averti que si la ligne de front cédait, «les Russes pourraient fondre sur les grandes villes». «Nous sommes en train de trouver un moyen de ne pas battre en retraite», a-t-il ajouté.

Depuis le mois de décembre, les Républicains du Congrès américain bloquent toujours une aide de 60 milliards de dollars destinée à l’Ukraine. Le 6 mars, la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, avait regretté que «l’Ukraine [perde] actuellement du terrain sur le champ de bataille», fustigeant «l’inaction du Congrès». Le 18 mars, le président ukrainien exhortait de nouveau le Congrès à «prendre une décision rapide».

Une offensive russe «en août, voire avant», d’après les officiers ukrainiens

«Le risque est grand que les lignes de front cèdent à n’importe quel endroit où les généraux russes décideront de lancer leur offensive», s’alarment les officiers ukrainiens, ajoutant que les bombardements aériens qui ont pilonné les positions ukrainiennes ces dernières semaines rendent possible une percée «à plusieurs endroits du front».

La localisation du lieu de cette percée n’est pas aisée, les militaires rappelant qu’une «pré-offensive» de missiles et drones russes s’abat depuis plusieurs semaines sur une ligne «s’étendant de Kharkiv et Soumy au nord à Odessa au sud», soit la quasi-totalité du front.

Pointant l’existence en Ukraine d’une crise politique qui serait un obstacle à l’élaboration d’une stratégie, les officiers affirment que la Russie est «en train d’accumuler des ressources» et sera prête à lancer «une attaque de grande ampleur en août, voire avant». 

Les Ukrainiens avaient quant à eux lancé leur propre contre-offensive de juin à octobre 2023. Une attaque brisée dès les premiers jours par les lignes de défense russes, avant que les troupes de Moscou ne reprennent l’initiative à l’automne. Une tendance qui s’est confirmée avec la prise le 17 février de la ville d’Avdeïevka par les forces armées russes. Depuis, les chances d’une victoire ukrainienne n’ont fait que s’amenuiser.

«Une guerre où il n’y a pas de seconde chance», selon Zaloujny

Les hauts-gradés ont en outre évoqué les propos du général Zaloujny, ex-commandant en chef des forces armées ukrainiennes, qui appelait cette guerre celle «où il n’y a pas de seconde chance», sous-entendant que les armes devenaient «très rapidement obsolètes» car contrées au bout de peu de temps par les Russes. Une manière de tordre le cou aux espoirs de voir une arme changer décisivement le cours du conflit. Et les officiers de citer les exemples des Storm Shadow et des missiles de croisière Scalp (fournies par la Grande-Bretagne et la France) dont l’efficacité n’a été que de courte durée.

Selon eux, le même problème risque de se poser avec les F-16 : «Chaque arme correspond à un momentum. On avait besoin des F-16 en 2023. En 2024, ils arriveront trop tard.» Une douzaine de F-16 devrait être livrée à l’été, le temps d’achever la formation de pilotes ukrainiens. Mais le fossé n’est pas que technologique ni stratégique : l’Ukraine souffre d’une réelle pénurie d’armements.

Double pénurie d’armes et d’hommes

Les officiers ont signalé le besoin de davantage d’armes traditionnelles et de drones, avançant le chiffre de quatre millions d’obus et de deux millions de drones. Pour rappel, la Tchéquie a proposé d’en fournir 800 000, portant les stocks ukrainiens à un million et demi, mais ce sera toujours insuffisant. Emmanuel Macron annonçait fièrement la production par la France de 3 000 obus par mois… alors que les troupes ukrainiennes en tirent 6 000 par jour, et les Russes cinq à dix fois plus. 

Outre l’aide américaine qui se fait attendre, l’existence d’une fronde au sein de l’UE opposée aux livraisons d’armes à l’Ukraine n’est pas de bon augure pour Kiev. En effet, la Slovaquie, l’Allemagne et la Hongrie ont à plusieurs reprises fait part de leur réticence à y envoyer des armes, plaidant en faveur d’une solution diplomatique au conflit.

À la pénurie d’armes s’ajoute celle des recrues. Alors que le général Zaloujny avait appelé en décembre à recruter «500 000 soldats», son successeur le général Syrsky, dans une interview au média ukrainien Ukrinform datée du 29 mars, a reconnu que ce chiffre avait été «considérablement réduit» et que les troupes étaient «épuisées physiquement et psychologiquement, notamment sur les zones de combat».

Du côté russe, «plus de 100 000 personnes se sont déjà inscrites sous contrat dans les forces armées» depuis le début de l’année, a-t-il été annoncé le 3 avril. Selon Moscou, aucune mobilisation n’est jugée nécessaire en raison de cet afflux de volontaires.

 

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