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Soudan : les combats reprennent malgré la trêve

Négociée par l'Arabie saoudite et les Etats-Unis, la trêve a une fois de plus été violée par l'armée soudanaise et les paramilitaires. Selon l'ONU, le pays est proche «du point de rupture». L'urgence humanitaire devient alarmante.

Des raids aériens, des tirs et des explosions ont de nouveau secoué Khartoum ce 1er mai, malgré une trêve dans les combats entre l’armée et les paramilitaires au Soudan, où la situation humanitaire est proche «du point de rupture», selon l’ONU.

Khartoum, la capitale de 5 millions d’habitants, est «survolée par les avions de combat» tandis que des tirs et des explosions résonnent dans différents quartiers, selon des témoins.

Les combats, qui ont fait des centaines de morts, ont éclaté le 15 avril entre les deux généraux aux commandes du pays depuis leur putsch de 2021, prenant au piège des millions de Soudanais.

«L’échelle et la vitesse à laquelle se déroulent les événements au Soudan [sont] sans précédent», a estimé le 30 avril l’ONU, qui a dépêché dans la région son responsable pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.

La «situation humanitaire atteint un point de rupture»

«Je suis en route […] afin d’étudier comment nous pouvons apporter une aide immédiate» aux habitants, a déclaré Martin Griffiths, pour qui la «situation humanitaire atteint un point de rupture» dans le pays, l’un des plus pauvres du monde.

Le pillage massif des bureaux et des entrepôts humanitaires a «épuisé la plupart de nos stocks», a-t-il affirmé.

Le chef de l’armée, Abdel Fattah al-Burhane, et le patron des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, avaient accepté de prolonger le 30 avril à minuit le cessez-le-feu de trois jours, après une «médiation des Etats-Unis et de l’Arabie saoudite», selon l’armée soudanaise.

Mais depuis le début du conflit, plusieurs trêves ont été annoncées avant d’être aussitôt violées. Selon les experts, elles signifient surtout que les couloirs sécurisés pour les évacuations des étrangers sont maintenus et que les négociations, qui ont lieu à l’étranger, se poursuivent. Jusqu’ici, les deux généraux répètent qu’ils refusent des négociations directes.

Les combats ont fait 528 morts et 4 599 blessés, selon des chiffres officiels largement sous-évalués. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) est parvenu le 30 avril à faire atterrir à Port-Soudan, à 850 kilomètres à l’est de Khartoum, un premier avion chargé de 8 tonnes d’aide. Cela ne soignera que «1 500 blessés», a-t-il prévenu.

Des milliers de déplacés 

L’ONU a recensé 75 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays. Au moins 20 000 ont fui vers le Tchad, 6 000 vers la Centrafrique et des milliers d’autres vers le Soudan du Sud et l’Ethiopie. 

Au total, jusqu’à 270 000 personnes, selon une estimation de l’ONU, pourraient fuir les combats qui touchent 12 des 18 Etats de ce pays de 45 millions d’habitants.

Les habitants de la capitale, quand ils ne fuient pas, restent barricadés, essayant de survivre malgré les pénuries de nourriture, d’eau et d’électricité.

L’Etat de Khartoum a donné «congé jusqu’à nouvel ordre» aux fonctionnaires, tandis que la police assure se déployer pour prévenir les pillages.

La plupart des hôpitaux du pays sont hors service. Pour ceux fonctionnant encore, «la situation est intenable» car le matériel manque, a affirmé à l’AFP Majzoub Saad Ibrahim, médecin à Ad-Damir, au nord de Khartoum.

Plusieurs pays, dont la France, l’Allemagne et les Etats-Unis, ont évacué leurs ressortissants et d’autres étrangers. Le Canada a mis fin à ses évacuations «en raison des conditions dangereuses».

Sur le front diplomatique, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Fayçal ben Farhane, a reçu le 30 avril un émissaire du général Burhane.

La Ligue arabe se réunit ce 1er mai au matin au Caire pour discuter de la situation au Soudan, après que les Emirats arabes unis, alliés du général Daglo selon les experts, ont annoncé avoir appelé le chef de l’armée pour évoquer l’avenir du pays.

Vers une reprise des combats au Darfour ?

Selon l’ONU, une centaine de personnes ont été tuées au Darfour-Ouest, une région marquée par la sanglante guerre civile déclenchée en 2003 entre la dictature d’Omar el-Béchir et des insurgés issus de minorités ethniques.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a mis en garde contre une situation «terrible», avec «des tribus qui essaient désormais de s’armer».

Alors que le drame humanitaire s’aggrave, l’ONG Médecins sans frontières (MSF) a arrêté «la quasi-totalité de [ses] activités» à cause des violences.

A la tête des miliciens Janjawid, le général Daglo avait mené la politique de la terre brûlée au Darfour, sur ordre d’Omar el-Béchir, renversé en 2019.

La guerre au Darfour a fait environ 300 000 morts et près de 2,5 millions de déplacés, selon l’ONU. Les Janjawid ont officiellement donné naissance en 2013 aux FSR, supplétif paramilitaire de l’armée.

Aujourd’hui rivaux, les généraux Burhane et Daglo avaient pourtant fait front commun lors du putsch de 2021 pour évincer les civils avec lesquels ils partageaient le pouvoir depuis la chute de Béchir.

Mais des divergences sont ensuite apparues et, faute d’accord sur l’intégration des FSR dans l’armée, celles-ci ont dégénéré en guerre ouverte.

Soudan : accord entre militaires et civils pour mettre fin à la crise politique

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