Le message de Novak Djokovic à Roland-Garros sur les tensions au Kosovo n'était «pas approprié», selon la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra. Le refus d'une joueuse ukrainienne de serrer la main de son adversaire biélorusse, lui, a été excusé.
«Le Kosovo est le cœur de la Serbie. Stop à la violence», a écrit le champion serbe Novak Djokovic sur une caméra prévue pour diffuser les messages des joueurs, à l’issue de son premier match, le 29 mai, au tournoi de Roland-Garros.
Un message «militant», «très politique», qui intervenait au moment d’une flambée de violence dans le nord du Kosovo mettant aux prises des manifestants de la minorité serbe et la force de l’OTAN qui y est stationnée.
Ces violences ont fait une trentaine de blessés parmi les soldats internationaux et une cinquantaine parmi les protestataires serbes. Ces derniers, avec le soutien de Belgrade, refusent de reconnaître l’autorité du gouvernement de Pristina depuis la déclaration d’indépendance unilatérale du Kosovo en 2008, soutenue par les puissances occidentales.
La ministre justifie le manque de fair-play d’une joueuse ukrainienne
Interrogée sur France 2 sur la prise de position de Novak Djokovic, dont le père est né au Kosovo, la ministre, ex-directrice de la Fédération française de tennis (FFT), a précisé que la directrice du tournoi Amélie Mauresmo «avait pu échanger avec» Djokovic «et avec son entourage», évoquant le principe «de neutralité du terrain de jeu».
Novak Djokovic doit rejouer en soirée ce 31 mai contre le Hongrois Marton Fucsovics.
Invitée à commenter l’expression de positions politiques pendant ce tournoi du Grand Chelem, comme celles des sportifs ukrainiens depuis la guerre, la ministre a souligné qu’elle ne mettait «pas les deux sujets sur le même plan».
«Quand on porte des messages qui sont de la défense des droits de l’homme, des messages qui rapprochent les peuples autour de valeurs universelles, un sportif est libre de le faire», a-t-elle déclaré. Mais, quand il s’agit d’un message «militant, très politique» comme celui du joueur serbe, «il ne faut pas que cela se reproduise».
A contrario, «ce qui se passe pour les Ukrainiens et Ukrainiennes sur le circuit est tellement douloureux, tellement difficile», a-t-elle souligné. Le 29 mai, l’Ukrainienne Marta Kostyuk n’a pas salué la Biélorusse Aryna Sabalenka à l’issue de leur match, ce qui lui a valu les sifflets du public de Roland-Garros. Elle entendait protester contre la réponse, selon elle trop timide, apportée par les instances du tennis à l’encontre de la Russie, et dénoncer le fait que Sabalenka ne prend pas position sur cette invasion. «Les gens devraient avoir honte» a-t-elle réagi, s’en prenant ainsi au public.
«On peut comprendre» le geste de la jeune Ukrainienne, «même si on aimerait qu’il y ait toujours du fair-play jusqu’au bout de serrer la main, il y a une douleur qui est là, que je respecte», a ajouté la ministre.
«Soutien à tout le peuple serbe»
Le lendemain, après son match remporté face à l’Américain Aleksandar Kovacevic 6-3, 6-2, 7-6 (7/1), Novak Djokovic, armé de son marqueur, avait inscrit son message en cyrillique sur la caméra du court Philippe-Chatrier.
Le joueur, en quête à Roland-Garros de son 23e tournoi du Grand Chelem – ce qui serait un record historique –, s’est justifié en conférence de presse devant les journalistes serbes. «C’est un sujet sensible, a-t-il reconnu. Je ressens une responsabilité supplémentaire en tant que personnalité publique et en tant que fils d’un homme né au Kosovo d’apporter mon soutien à tout le peuple serbe. C’est le moins que je puisse faire. Je ne suis pas un politicien et je n’ai pas l’intention d’engager un débat.»
De nombreux Serbes considèrent le Kosovo comme leur berceau national et religieux et une minorité y vit toujours.
La charte d’éthique de Roland-Garros proscrit les prises de position politique ou religieuse. Mais la FFT a publié un communiqué assez sibyllin, sans aborder la question d’une éventuelle sanction : «Les débats qui traversent l’actualité internationale s’invitent parfois en marge du tournoi, c’est compréhensible», a simplement déclaré la fédération.
Nord du Kosovo: malgré une abstention record, Pristina entend imposer ses représentants par la force