Un policier a été tué dans le nord de la Tanzanie lors de confrontations avec la communauté masaï locale qui s'oppose à la pose de «balises» séparant zones d'habitat humain et d'animaux sauvages, craignant d'être expulsés de leur habitat historique
Lors d’une adresse vidéo diffusée ce 11 juin, le préfet de la région tanzanienne d’Arusha, John Mongela, a affirmé qu’un officier de police avait été mortellement atteint par une flèche, la veille en fin de journée, au moment où des équipes venaient poser des poteaux séparant une zone d’habitat de celle de la faune sauvage.
«Il est très regrettable qu’un policier ait été tué par des flèches tirées par un groupe de personnes qui voulaient bloquer la pose de balises et a même voulu attaquer ceux qui menaient ces opérations», a-t-il déclaré.
Depuis plusieurs années, les Masaï de Loliondo s’opposent aux autorités tanzaniennes, qu’ils accusent de vouloir les expulser d’une partie de leur zone d’habitat historique pour en faire une zone réservée aux safaris et à des chasses privées, ce que le gouvernement dément.
Le gouvernement affirme vouloir protéger des activités humaines 1 500 km2 sur les 4 000 km2 de cette région située non loin du parc du Serengeti, laissant 2 500 km2 aux bergers masaï.
Flèches contre tirs à balles réelles
Selon des photos et vidéos sur les réseaux sociaux, plusieurs dizaines de Masaï se sont opposés à ces opérations durant les dernières 48 heures.
The highest level of torture and intimidation in grabbing the community land in loliondo. The community of loliondo protested against placing of beacons 1500Km which is the community land. @Oleshangay@AnethStanley@SusannaN2@SuluhuSamia@ThabitSeniorpic.twitter.com/SBoY5wVWLm
— Alakara Ole lemoloo (@alakara_shayo) June 9, 2022
Ces images ont également montré des Masaï se dispersant alors que résonnaient des tirs. Selon des militants communautaires, la police a tiré à balles réelles. L’avocat et militant des droits de l’Homme, Joseph Moses Oleshangay, a affirmé le 11 juin sur Twitter que «plus de 40 personnes ont été grièvement blessées» et qu’«un homme de plus de 80 ans blessé est porté disparu».
Evoquant «plusieurs personnes blessées et sans médicament» et «huit responsables de circonscriptions» dont le sort est inconnu, le président de la Coalition tanzanienne des défenseurs des droits de l’Homme, Onesmo Olengurumwa, a demandé à la présidente Samia Suluhu Hassan d’intervenir.
«Il n’y a pas de blessés dans nos hôpitaux jusqu’à présent et si quelqu’un a été blessé, il doit venir se faire soigner», a déclaré John Mongela, estimant que des images «étaient diffusées par des personnes mal intentionnées». Le placement des balises se poursuivait selon lui dans le calme ce 11 juin.
La crainte des expulsions
Le Premier ministre Kassim Majaliwa a répété la veille devant le Parlement qu’«aucune expulsion n’est prévue à Loliondo».
En 2009, des milliers de familles masaï ont été expulsées de Loliondo pour permettre à une société émiratie, Ortelo Business Corporation (OBC), d’organiser des séjours de chasse. Le gouvernement a mis fin à cet accord en 2017 après des accusations de corruption.
La zone de Loliondo est située à 125 kilomètres au nord de la célèbre réserve de Ngorongoro, où le gouvernement souhaite endiguer l’explosion de la population humaine.
Les Masaï et leurs troupeaux se retrouvent en concurrence avec la faune sauvage et «Ngorongoro est en train de se perdre», a déclaré l’an dernier la présidente Samia Suluhu Hassan. Le gouvernement a proposé aux habitants du cratère un programme de relocalisation volontaire.
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