Chef d'un parti d'opposition, le député Viktor Medvedtchouk a été arrêté par le SBU. Volodymyr Zelensky a proposé à la Russie de l'échanger contre des prisonniers de guerre. Le Kremlin dénonce la persécution d'un opposant politique.
Le Service de sécurité d’Ukraine (SBU) a déclaré le 12 avril avoir arrêté Viktor Medvedtchouk, chef du parti Plateforme d’opposition-Pour la vie.
La photo de Viktor Medvedtchouk, en uniforme et menotté, a été publiée sur le compte Telegram officiel du SBU. En commentaire de cette publication, le chef du SBU Ivan Bakanov a remercié les officiers pour «l’opération spéciale visant à arrêter Medvedtchouk, qui est – pour l’instant – député du peuple».
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fait savoir le lendemain qu’il était prêt à échanger Viktor Medvedtchouk contre des prisonniers de guerre ukrainiens. «Je propose à la Fédération de Russie d’échanger [Medvedtchouk] contre nos compatriotes qui sont en captivité en Russie», a-t-il déclaré dans une allocution vidéo. «C’est pourquoi il est important que nos forces de l’ordre et nos militaires envisagent également cette possibilité», a-t-il ajouté, affirmant que l’opposant était «en fuite» depuis 48 jours.
Une proposition qui a surpris du côté du Kremlin, Dmitri Peskov rappelant ce 13 avril que Viktor Medvedtchouk n’est pas un citoyen russe : «C’est un homme politique étranger. Nous ne savons pas du tout s’il souhaite lui-même que la Russie soit impliquée dans la résolution de cette situation [infamante] pour lui», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse téléphonique.
Si le porte-parole du Kremlin a tenu à souligner que les opinions de Viktor Medvedtchouk en faveur de l’établissement de relations normales et d’un partenariat mutuellement bénéfique entre l’Ukraine et la Russie étaient «bien connues», cela ne signifiait pas pour autant que l’opposant ait eu de «relations secrètes avec la Russie». «Mais même si on imagine ça hypothétiquement, on pourrait certainement comprendre que [Viktor] Medvedtchouk aurait quitté le territoire ukrainien avant le lancement de l’opération militaire spéciale. Il ne l’a pas fait, comme nous pouvons le constater», a ainsi fait remarquer Dmitri Peskov.
Toujours est-il que la Russie va «suivre le sort» de l’opposant politique, et appelle les «politiciens européens qui se soucient tant de la liberté d’expression et affirment qu’il est inadmissible de persécuter une personne pour des raisons politiques» à en faire autant. «Il s’agit d’une situation de ce type et il convient ici de s’attendre à ce qu’ils empêchent les représentants du régime de Kiev de persécuter un homme pour ses opinions politiques. Tout ce qui est arrivé à Victor Medvedtchouk est une illustration frappante de ce qu’est réellement le régime de Kiev», a conclu Dmitri Peskov, louant également le travail humanitaire effectué par le député ces dernières années dans le Donbass.
Dans le viseur de Kiev
En mai 2021, Viktor Medvedtchouk avait été accusé par Kiev de haute trahison et de «violation des lois et coutumes de la guerre». Il avait été placé en résidence surveillée, une mesure qui a depuis été prolongée à plusieurs reprises.
D’autres charges ont été retenues contre le chef de l’opposition en octobre 2021, à savoir une autre accusation de trahison d’Etat et d’assistance à des activités terroristes.
Selon les enquêteurs ukrainiens, il a été impliqué dans des livraisons de charbon provenant de zones du Donbass fin 2014 – début 2015, pour une valeur d’environ 7,6 millions de dollars. De son côté, Viktor Medvedchouk a dénoncé toutes les accusations comme étant politiquement motivées et non fondées.
Le 27 février dernier, l’avocate du député a déclaré que celui-ci avait quitté son domicile à Kiev, où il était assigné à résidence, craignant pour sa vie face aux menaces de groupes nationalistes. Toutefois, selon elle, il était resté dans la capitale ukrainienne. Le 18 mars, un tribunal ukrainien a condamné l’opposant par contumace et l’a inscrit sur la liste des personnes recherchées.
Le parti de Viktor Medvedtchouk Plateforme d’opposition-Pour la vie, compte 44 élus sur 450 à la Rada, le Parlement ukrainien. C’est le principal parti parmi les 11 partis politiques dont les activités ont été suspendues en vertu de la loi martiale en Ukraine, le 20 mars dernier, en raison de leurs liens présumés avec la Russie.
Viktor Medvedtchouk est accusé entre autres d’entretenir des relations amicales avec Vladimir Poutine qui serait, selon ses dires, le parrain de sa fille.
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