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Aux États-Unis, les électeurs d’origine arabe veulent «punir» Biden dans les urnes

À Dearborn, dans le nord des États-Unis, il n'est pas rare d'être accueilli en arabe dans les magasins aux enseignes bilingues. Ici, de nombreux habitants disent ressentir la guerre à Gaza dans leur chair, et ils comptent bien sanctionner dans les urnes le président Joe Biden pour son soutien à Israël.

Riyad Al-Maliki, ministre des Affaires étrangères de l'Autorité palestinienne, en janvier 2023 au Conseil de sécurité (image d'illustration).

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Devant cette mosquée de Dearborn, une banlieue de Detroit à la population en grande partie musulmane et d’origine arabe, Samra’a Luqman distribue des prospectus. «Votez pour la Palestine. Pas pour Biden», lance la jeune femme aux fidèles sortant de la grande prière hebdomadaire du vendredi. «Bien sûr», répondent plusieurs d’entre eux.

Samra’a Luqman est l’une des responsables de la campagne «Abandon Biden» pour le Michigan, l’un des États-clés qui peuvent faire basculer les présidentielles et où chaque voix compte. Son objectif est simple : faire perdre Joe Biden, qui brigue un second mandat le 5 novembre.

Le démocrate «n’est pas [seulement] complice du génocide, il commet le génocide. Il le finance» en fournissant de l’aide à Israël, assène la militante d’origine yéménite.

En 2020, face au républicain Donald Trump, Joe Biden l’avait emporté dans le Michigan. Mais un récent sondage le place derrière son rival cette année. 

«Le seul moyen pour que je vote Biden, ce serait qu’il ressuscite les 30 000 personnes mortes à Gaza, lâche Samra’a Luqman.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas en Israël qui a fait plus de 1 160 morts, majoritairement des civils. L’offensive israélienne menée en représailles a fait 29 313 morts, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé à Gaza.

«Jamais» Biden

En cette froide après-midi, Samra’a Luqman exhorte les électeurs à ne surtout pas cocher la case «Biden» lors de la primaire démocrate du 27 février dans le Michigan, mais à voter blanc ou à écrire «Libérez la Palestine» sur le bulletin.

Il s’agit de «faire pression» sur le président pour qu’il réclame un «cessez-le-feu permanent», et de lui montrer qu’un électorat qui a contribué à le porter au pouvoir peut aussi lui retirer son soutien, affirme Abbas Alawieh, porte-parole de «Listen to Michigan» («Écoutez le Michigan»).

Cette initiative, qui a lancé l’appel à boycotter Joe Biden lors de la primaire, a été formée, entre autres, par Layla Elabed, une sœur de l’élue démocrate d’origine palestinienne Rashida Tlaib.

«Dans cette communauté, beaucoup de personnes sont directement affectées par la guerre, lorsqu’un conflit financé par notre pays se produit au Moyen-Orient», explique le stratège démocrate né au Liban, qui a été directeur de cabinet d’élus de gauche à Washington pendant plusieurs années.

Aujourd’hui, les démocrates risquent «de perdre cette communauté. Pas seulement en novembre, mais peut-être pour une génération», avertit Abbas Alawieh.

Mohamed Alemara, étudiant en médecine de 23 ans d’origine irakienne, est venu assister à une réunion mi-religieuse mi-spirituelle dans une école.

En 2020, il a voté Biden. «La pire erreur de ma vie», déclare-t-il, affirmant se sentir «coupable par association» de ce qui se passe à Gaza. Pour le 5 novembre, «c’est tout vu». «Jamais» il ne votera de nouveau Biden, déclare-t-il. 

Bien qu’elle ait voté démocrate la dernière fois, Fatima Elzaghir, infirmière de 27 ans, se dit prête à donner sa voix à Trump. «Je crois que je vais choisir le moindre mal et pour l’instant, le moindre mal c’est Trump», affirme-t-elle.

«Appelez vos élus»

Face à l’incompréhension que suscite souvent le choix de se reporter sur ou de laisser gagner celui qui a mis en place, pendant son mandat, un décret migratoire controversé ciblant des pays musulmans (le fameux «Muslim ban»), Samra’a Luqman répond être très consciente des enjeux.

«Nous ne sommes pas stupides. Mon intention est de punir Biden. J’ai survécu à un “Muslim ban”, mais ces enfants à Gaza n’ont pas survécu à Joe Biden», affirme-t-elle.

Abbas Alawieh prend une longue inspiration avant de s’adresser à ceux qui s’interrogent.

«Comment osez-vous me dire “Oh, plus tard, Trump ce sera de votre faute” ? Ne venez pas me voir. Appelez vos élus. Dites-leur que vous voulez un cessez-le-feu […]. Une fois que nous aurons mis fin au carnage, nous pourrons parler des conséquences politiques», dit-il fermement. 

Dans cette région berceau de l’industrie automobile, de nombreux ouvriers, souvent syndiqués et marqués à gauche, font aussi part de leur colère.

Merwan Beydoun travaille dans une aciérie et fait partie du grand syndicat UAW, qui a annoncé appuyer le chef de l’Etat. «Furieux» du soutien de Joe Biden à Israël, il a publiquement annoncé qu’il cesserait de contribuer au fonds d’action politique de l’UAW, mais reste syndiqué.

Longtemps «très pro-démocrate», fervent partisan du mouvement syndical, il préfère ne pas encore dire ce qu’il fera le jour de la présidentielle. Mais Joe Biden «doit se réveiller» et changer de politique s’il veut son vote, selon lui. 

Le 20 février, l’administration Biden a encore opposé un veto à une résolution onusienne réclamant un cessez-le-feu immédiat à Gaza.

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