Selon le site d'investigation américain The Intercept, l'armée ukrainienne expérimente l'usage de l'ibogaïne pour doper ses troupes et soigner des traumatisés crâniens. Il s'agit d'un puissant psychotrope hallucinogène interdit dans de nombreux pays, dont la France et la Russie, qui n'est pas sans danger en cas de fortes doses.
L’armée ukrainienne expérimente une drogue sur ses soldats. C’est la révélation faite le 17 janvier par le commentateur américain Ryan Grim dans les colonnes du site d’information The Intercept.
«À l’initiative de Rick Doblin de la MAPS, l’association pluridisciplinaire d’études psychédéliques [basée en Californie], nous avons passé un contrat avec Irvin Dana Beal et la compagnie IboGrow», a déclaré dans une lettre à la police aux frontières citée par Ryan Grim le psychologue militaire ukrainien Olexii Syrtchak. Il a ajouté que l’objet de ce contrat était «de fournir de l’ibogaïne pharmaceutique aux hôpitaux soignant des vétérans et à l’armée ukrainienne», à la fois pour traiter les «lésions cérébrales traumatiques et l’épuisement sur le champ de bataille».
L’ibogaïne est un puissant psychotrope aux propriétés euphorisantes et hallucinogènes. Cette substance est extraite de l’iboga, un arbuste des forêts équatoriales africaines. Pour le moment, l’armée ukrainienne a recours à des racines importées d’Accra au Ghana, mais elle envisage par la suite de produire elle-même de l’ibogaïne de synthèse en collaboration avec une entreprise israélienne, toujours selon The Intercept.
Quand l’armée ukrainienne recrute un ancien Yippie
À dose modérée, l’ibogaïne permet, par ses effets psychostimulants, d’augmenter les performances au combat. Toutefois, elle n’est pas sans danger : en effet, à haute dose, elle peut susciter de l’anxiété, des convulsions allant jusqu’à la paralysie. Elle présente en outre des risques cardiovasculaires, notamment de crise cardiaque, selon les experts interrogés par le média américain. En revanche, comparée aux amphétamines, elle offre l’avantage de ne pas occasionner de vieillissement prématuré.
Pour développer l’usage de l’ibogaïne, Kiev a fait appel à l’un de ses partisans de longue date : Irvin Dana Beal, fondateur en 1967 des Yippies (parti international de la jeunesse). Figure emblématique des mouvements libertaires et pacifistes des années 1960, celui-ci a défendu l’intérêt de l’ibogaïne dans l’addictologie comme moyen de sevrage de dépendances à l’alcool ou à d’autres drogues, dans le sillage des découvertes de Howard Lotsof. Le psychologue militaire Olexii Skyrtach lui a remis une lettre l’autorisant à passer la frontière ukrainienne avec cette drogue dans ses bagages sans être inquiété par les douanes, révèle The Intercept.
«Avec l’ibogaïne, la sensation de satisfaction extrême est au-delà des mots», décrit Irvin Dana Beal dans l’enquête, soulignant que les gens connaissent ainsi de «meilleurs hauts» et que ce genre de «récompense» est «extrêmement important pour préserver le moral sur un champ de bataille».
«Il nous faut le plus d’ibogaïne possible»
Mais une fois de retour des combats, l’ibogaïne serait aussi très efficace pour améliorer des problèmes chroniques dus à des lésions cérébrales traumatiques, ainsi que l’établit la revue Nature Medecine dans un article publié le 5 janvier : «Après le traitement, les participants ont témoigné d’une réduction notable de ces symptômes […] et les bénéfices se sont maintenus durant un mois.»
«Ces gars ont besoin de quelque chose pour leurs lésions cérébrales», estime Irvin Dana Beale. «Apparemment, personne à part moi n’a envie d’aller en zone de guerre avec de l’ibogaïne», regrette-t-il néanmoins.
L’usage de drogue en temps de guerre a déjà été pratiqué, à l’instar du régime nazi qui employait la pervitine, une redoutable méthamphétamine connue aujourd’hui sous le nom de crystal. L’usage de l’héroïne par les GIs au Vietnam a aussi été maintes fois dénoncé.
Cette révélation sur l’expérimentation par Kiev de l’ibogaïne intervient alors que le constat de l’échec de la contre-offensive ukrainienne est désormais partagé de manière unanime par les dirigeants mondiaux.
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