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Le Drian à Beyrouth : la France s’accroche désespérément au dossier libanais

Jean-Yves le Drian s'est rendu à Beyrouth pour tenter de convaincre les dirigeants libanais de sortir de la crise. L'envoyé spécial du Liban d'Emmanuel Macron a été confronté une nouvelle fois aux nombreuses divergences des chefs locaux. Paris s'accroche tant bien que mal à son influence au pays du Cèdre.

Pour la quatrième fois depuis le mois de juin, l’envoyé spécial d’Emmanuel Macron pour le Liban Jean-Yves Le Drian s’est rendu à Beyrouth les 28 et 29 novembre. Une fois de plus, cette visite diplomatique n’a eu aucun résultat probant. 

Nommé le 7 juin dernier au poste d’«envoyé spécial pour le Liban», l’ancien chef de la diplomatie française s’est une nouvelle fois rendu dans la capitale libanaise pour tenter de trouver une solution à la crise économique et politique dans laquelle est enfoncé le pays du Cèdre.

Depuis le 31 octobre 2022 et la fin du mandat de Michel Aoun, le Liban est dépourvu de chef de l’Etat. De surcroît, le pays traverse une crise économique sans précédent. Les banques sont insolvables, plus de 80% de la population vit sous le seuil de pauvreté, les pénuries s’enchaînent et les tensions entre Israël et le parti chiite pro-iranien se sont accentuées depuis le 7 octobre. 

Le 29 novembre, Jean-Yves Le Drian a rencontré les dirigeants libanais, à l’instar de Nagib Mikati le Premier ministre sortant, Joseph Aoun le général de l’armée libanaise, Nabih Berry le chef du Parlement, Walid Joumblatt l’ancien leader du Parti socialiste progressiste, Samir Geagea le dirigeant des Forces libanaises, proche de l’Arabie saoudite et de l’Occident, et Sleiman Frangié, le meneur du mouvement des Marada, allié de la Syrie de Bachar al-Assad.

Politique erratique, ton paternaliste

Au cours de ses nombreux entretiens, l’émissaire français a affirmé que sa visite visait «à renouveler la position du quintette (Etats-Unis, Arabie saoudite, France, Egypte et Qatar) qui appelle les Libanais à unifier leur position, à accélérer la tenue de l’échéance présidentielle et à se montrer prêts à être aidés dans ce cadre», rapporte le site du journal libanais L’Orient-Le Jour. Jean-Yves Le Drian a également indiqué qu’il tiendrait plusieurs réunions sur le dossier libanais avec ses partenaires étrangers. Sur la plateforme X (ex-Twitter), le diplomate français a évoqué des «échanges fructueux pour la tenue rapide d’élections présidentielles».

Côté libanais, une fois de plus, la mésentente est de mise. Si Nagib Mikati évoque la priorité de «mettre fin à l’agression israélienne contre Gaza et le Liban-Sud», le leader chrétien Samir Geagea pointe du doigt la responsabilité du Hezbollah dans le blocage politique. 

Dans une lettre publiée par L’Orient-Le Jour le 26 septembre dernier, l’émissaire français préconisait une «troisième voix» pour sortir du blocage permanent entre les deux principaux candidats à la présidentielle, à savoir Sleiman Frangié et Jihad Azour. Dans cette note, il a même laissé planer l’idée d’imposer des sanctions aux dirigeants libanais. En cas d’échec des consultations, «ils devront assumer les conséquences de leur irresponsabilité. Je pense que chacun comprendra ce que cela veut dire», s’était-il borné à répondre. 

Le naufrage de la diplomatie française

L’ancien ministre français des Affaires étrangères était même allé plus loin le 15 août dernier lorsqu’il avait enjoint les dirigeants libanais de répondre à un… quizz avant son déplacement à Beyrouth. L’envoyé du Quai d’Orsay demandait en effet des réponses «synthétiques» à deux questions : «Quelles sont pour votre force politique les chantiers prioritaires relevant du mandat du président de la République pour les six prochaines années ?» et «Quelles sont les qualités et les compétences dont devra disposer le futur président de la République pour les relever». De surcroît, l’ancien chef de la diplomatie française exigeait des réponses avant «le 31 août». 

Le Drian le 13 septembre à Beyrouth avec le dirigeant druze Walid Jumblatt (à droite).

Le Drian préconise une «troisième voix» au Liban et laisse planer la menace des sanctions

Cette nouvelle tournée libanaise atteste que la France s’accroche au pays du Cèdre. Lancée par Emmanuel Macron au lendemain de la terrible explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020, l’initiative française bat de l’aile. Pourtant, le président français avait donné de sa personne. Il était descendu dans les rues de la capitale libanaise, chemise entrouverte, pour serrer des mains et prendre un bain de foule. Mais très rapidement, sa politique libanaise a pris un tournant paternaliste : en septembre 2020, il a réuni tous les partis politiques pour les sommer de former un nouveau gouvernement. 

Face à l’inaction des élus libanais, Emmanuel Macron s’en est à l’occasion pris ouvertement au Hezbollah, le jugeant responsable du blocage, pour finalement jeter son dévolu sur l’ancien Premier ministre et ami de Paris Saad Hariri, et ce, alors même que le dirigeant saoudo-libanais avait été rejeté par la rue libanaise un an plus tôt. 

La France, dans l’espoir d’éviter de perdre son ancien pré-carré au Proche-Orient, avait changé de ton pour brandir la menace des sanctions contre certains dirigeants libanais. En avril 2021, alors  ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian avait interdit plusieurs politiques libanais de territoire français. Avec ces mesures coercitives, Paris avait ainsi emboîté le pas de Washington, qui avait gelé les avoirs de responsables proches du Hezbollah. Plus récemment, c’est l’ancien directeur de la banque centrale libanaise Riad Salamé qui a fait en juillet 2023 l’objet de plusieurs sanctions financières de la part des autorités de Londres, de Washington et d’Ottawa.

Le Drian donne des devoirs aux partis politiques libanais avant son déplacement en septembre

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