L’affrontement entre l’Iran et Israël a servi de catalyseur à une nouvelle escalade de la part des dirigeants occidentaux, enfermés dans leur rhétorique et leur refus de tout compromis à travers le monde, estime Timour Fomenko. Le danger d'une Troisième Guerre mondiale n'est plus exclure, pense-t-il.
Cet article a été initialement publié sur RT International par Timour Fomenko, analyste politique.
Les événements de ces dernières semaines ont provoqué une secousse soudaine dans la politique occidentale. Après la léthargie déjà visible dans le discours américain et occidental à propos de la guerre en Ukraine, l’attaque iranienne contre Israël semble avoir eu pour effet de faire sortir Ronald Reagan de sa tombe et d’entraîner un élan de néo-conservatisme sous stéroïdes des deux côtés de l’Atlantique.
Le président de la Chambre des représentants des États-Unis, Mike Johnson, a fait un virage à 180 degrés et s’est déclaré « républicain à la Reagan », dénonçant « l’Axe du Mal » et adoptant une série de projets de loi sur l’aide étrangère pour des montants astronomiques qu’il avait jusqu’alors bloqués depuis des mois. En même temps, un projet de loi sur l’interdiction de TikTok est sorti de nulle part pour être rapidement promulgué.
Rhétorique musclée
Le Royaume-Uni a ensuite décidé de verser à l’Ukraine son plus grand paquet d’aide, alors que le Premier ministre Rishi Sunak a mis en garde contre un « axe des pays autoritaires » en amplifiant une rhétorique idéologiquement musclée. Parallèlement, il a été révélé que l’administration Biden avait fourni à l’Ukraine des missiles ATACMS d’une portée de 300 km, malgré avoir promis depuis des années de ne pas le faire, par crainte d’une nouvelle escalade. Enfin, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a soudainement décidé d’intensifier la guerre économique contre la Chine, poussant la Commission à ouvrir des enquêtes sur un grand éventail d’exportations chinoises. Quelle est la raison exacte de tout cela ?
C’est presque comme si les États-Unis et leurs alliés avaient profité des tensions entre l’Iran et Israël pour « blanchir » leur image et redoubler d’efforts pour atteindre un certain nombre d’objectifs pour lesquels ils auraient autrement perdu le soutien public, notamment la guerre en Ukraine et l’invasion israélienne à Gaza. La question se pose de savoir si l’attaque israélienne contre le complexe iranien à Damas, qui a provoqué la riposte de Téhéran, a été délibérément mise en scène, coordonnée et planifiée à cette fin. Cela a servi un objectif mutuellement bénéfique : permettre au Premier ministre Netanyahou et aux gouvernements occidentaux de se tirer d’affaire, quelle que soit l’opposition à laquelle ils étaient autrement confrontés.
Il devrait maintenant être parfaitement clair que les autorités actuelles à Londres et à Washington n’ont absolument aucune intention de mettre fin aux guerres qu’elles ont provoquées, tout en poussant vers une troisième guerre potentielle avec la Chine, et semblent indifférentes aux conséquences, même si, par exemple, la guerre entre Israël et Gaza fait voler en éclats la prétendue supériorité morale de l’Occident. Dans chaque cas, les enjeux sont très élevés, la politique étrangère occidentale dans son ensemble a acquis un caractère idéologique à somme nulle qui déplore la perte de l’hégémonie et cherche à la maintenir à tout prix. L’Occident est réactionnaire dans la mesure où il n’a pas de vision pour améliorer le monde, mais veut le restaurer tel qu’il était. C’est un sentiment de droit et de privilège qui cherche à réprimer la multipolarité émergente.
Les dirigeants occidentaux ignorent tout compromis
Par conséquent, il est devenu impossible pour les dirigeants occidentaux de prendre en considération le concept de compromis dans ces théâtres respectifs. Ils refusent en toutes circonstances de faire des concessions qui pourraient être qualifiées de stratégiques. Ainsi, le seul résultat qu’ils sont prêts à accepter en Ukraine est ce qu’ils appellent « la défaite de Poutine ». Ils ont depuis lors provoqué subtilement une escalade, se rapprochant de plus en plus du point où une « guerre par procuration » devient directe, à toutes fins utiles. Des conseillers militaires de l’OTAN sont déjà sur le terrain, et les attaques ukrainiennes sont désormais dirigées par les services de renseignement de l’OTAN, voire coordonnées par des amiraux britanniques.
Les médias occidentaux, surtout britanniques (il y a plus de dissidence aux États-Unis), sont effectivement en mode guerrier. La BBC ne cesse d’amplifier la propagande en faveur de l’Ukraine, promouvant toute affirmation censée aider Kiev, sans tenir compte de sa valeur empirique ou des preuves. Toutes les voix dissidentes ont été étouffées. Il semble évident que la décision a été prise de risquer une guerre totale avec la Russie plutôt que d’envisager un scénario de négociations. Ainsi, les ondes de choc de la saga israélo-iranienne ont été utilisées pour lancer un nouveau et soudain cycle d’escalade sur tous les fronts qui ne peut qu’avoir été renforcé par les élections prévues à la fois aux États-Unis et au Royaume-Uni.
Attention danger
C’est pourquoi il est juste de dire que le monde est confronté à une perspective plus dangereuse et plus incertaine que jamais depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La génération actuelle des dirigeants occidentaux ne se caractérise pas par un état d’esprit plus modéré et plus calculé, comme ce fut le cas pendant la majeure partie de la guerre froide, mais par un esprit d’état agressif et évangélique qui ne privilégie pas la stabilité mais affirme l’hégémonie comme un droit absolu, ce qui ressemble davantage au monde d’avant 1914. Ainsi, nous ne pouvons que conclure que les dirigeants occidentaux ne cherchent pas vraiment à éviter la guerre mais sont prêts à s’y engager si nécessaire. L’establishment militaire britannique et les médias parlent depuis longtemps de la conscription. Aux États-Unis, si Joe Biden souhaite être réélu, on peut supposer qu’il se lancera délibérément dans une escalade sur tous les fronts. La Troisième Guerre mondiale n’est plus le spectre dramatisé d’une panique exagérée mais une possibilité réelle qui ne devrait pas être exclue.
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