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Missiles Taurus : face au refus de Scholz, la presse britannique maintient la pression sur Berlin

Alors qu’Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont cherché, le 15 mars à Berlin, à renvoyer une image d’unité dans leur soutien à l’Ukraine, des titres de la presse britannique sont revenus sur les pressions exercées sur le chancelier allemand pour fournir des missiles Taurus à l’Ukraine, n’hésitant pas à appuyer sur les dissensions entre Berlin et Paris.

Le président français Emmanuel Macron salue le président lituanien avant leur rencontre à l'Élysée à Paris, le 12 mars 2024 (photo d’illustration).

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Le 15 mars à Berlin, Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Donald Tusk ont affiché leur «unité» à l’occasion d’une rencontre au format «triangle de Weimar». «Aujourd’hui plus que jamais, notre unité fait notre force et surtout nos trois États, l’Allemagne, la Pologne et la France, portent une responsabilité particulière», a déclaré le chancelier allemand à l’issue de la réunion.

Les trois pays sont «unis, déterminés» et «résolus à ne jamais laisser gagner la Russie et à soutenir le peuple ukrainien jusqu’au bout», lui a fait écho le président français. «Nous continuerons comme nous l’avons fait depuis le premier jour à ne jamais prendre l’initiative de quelque escalade», a affirmé devant la presse Emmanuel Macron dont le gouvernement, en janvier 2023, avait ouvert la voie aux livraisons de chars de combat aux forces de Kiev. Pour sa part, le Premier ministre polonais a déclaré que les «rumeurs malveillantes de divergences entre les capitales européennes sont exagérées».

C’était sans compter sur la presse britannique, qui fait ses choux gras des querelles franco-allemandes. «Quand Poutine tousse, Scholz s’enfuit», titrait The Times, dans la foulée de la rencontre des trois hommes d’État, reprenant des propos attribués à un conseiller du président français : «quand Poutine tousse, Scholz se met immédiatement à la recherche d’un bunker».

«Une démonstration ostentatoire d’unité»

Une phrase assassine, ébruitée quelques jours plus tôt, par un autre titre de la presse britannique : l’hebdomadaire europhile The New European. «Macron et Scholz ne se parlent même pas», venait enchérir un «diplomate basé à Berlin», cité par l’auteur de l’article. Des affirmations qui tranchent avec celles d’Olaf Scholz qui, le 13 mars, avait assuré avoir avec Emmanuel Macron «une très bonne relation personnelle».

Plus sobrement, The Guardian estimait le 15 mars que cette «démonstration ostentatoire d’unité», à l’issue d’une réunion «organisée à la hate», n’avait «pas caché le fait que Paris et Berlin ont désormais des perspectives différentes sur le double spectre de l’avancée militaire russe en Ukraine et du refus du Congrès américain d’approuver une aide militaire supplémentaire substantielle à Kiev». Un angle d’attaque déjà pris la veille par le Daily Mail. Parlant de l’«autre guerre en Europe», le quotidien britannique étrille, à renfort d’intervenants, un Emmanuel Macron qui «tente de diriger l’OTAN comme un “Napoléon” condamnant les “lâches” allemands».

Au centre des dissensions entre Paris et Berlin figure le refus d’Olaf Scholz de fournir des missiles longues portées à Kiev. Comme au temps des chars Leopard, le chancelier allemand est critiqué – tant au sein de sa coalition que par des chancelleries occidentales – pour son refus de donner son feu vert à livraison des Taurus à l’Ukraine.

Quand la diplomatie britannique veut forcer la mains de Berlin

Comme le répète depuis le 26 février le chancelier allemand, le réglage de ces engins nécessiterait l’intervention de militaires allemands. Une ligne rouge, dans la belligérance, qu’Olaf Scholz refuse de faire franchir à son pays. Une justification qui a d’ailleurs mis dans l’embarra Londres et Paris, qui ont déjà fourni à Kiev des missiles à longue portée, le chancelier allemand ayant laissé entendre que des éléments des services britanniques et français seraient déjà présents sur le sol ukrainien pour aider les forces de Kiev à frapper des cibles russes.

«Le chancelier et ses alliés sont exaspérés par les critiques», souligne The Times. En effet, l’Allemagne est de loin le premier soutien militaire de Kiev au sein de l’Union européenne, France comprise. Dans le décompte tenu par le think tank allemand Kiel Institute, l’Hexagone ne pointe qu’à la seizième place des soutiens militaires de l’Ukraine. Un écart dont se plaint régulièrement Olaf Scholz, estimant que certains pays auraient les moyens d’en faire plus, notamment la France et l’Italie. Mi-janvier, le Financial Times révélait qu’à la suite d’une demande formulée par Olaf Scholz, les services de la Commission européenne avaient lancé un audit des États membres sur la quantité d’armements fournis par ces derniers à l’Ukraine.

Pour tenter de convaincre Olaf Scholz, le chef de la diplomatie britannique, David Cameron, avait déclaré lors d’une interview au Süddeutsche Zeitung publiée le 9 mars que Londres était disposé à acheter des Taurus allemands en échange desquels la Grande-Bretagne enverrait davantage de ses propres missiles longue portée à l’Ukraine. Un arrangement refusé, dans la foulée, par le ministre allemand de la Défense. Réinterrogé depuis par la presse, le chancelier allemand a réitéré son refus de livrer ces missiles à l’Ukraine.

Le Bundestag dit «non» à la livraison des Taurus à Kiev

Une position qu’il peut se permettre, car sur cette question Olaf Scholz n’est pas aussi isolé sur la scène politique allemande que ses détracteurs ne le laissent entendre. Par 495 voix contre, face à 190 voix pour et cinq abstentions, le Bundestag a rejeté le 14 mars la motion déposée par la CDU/CSU visant à forcer le gouvernement allemand à livrer les Taurus à l’Ukraine.

Bundestag à l’endroit duquel la Douma a appelé le 12 mars à enquêter, après la publication d’un enregistrement audio dans lequel on peut entendre des officiers supérieurs allemands évoquer la livraison des Taurus à l’Ukraine ainsi que le ciblage du pont de Crimée avec ces missiles. «Nous percevons cela comme une agression, nous considérons cela comme une menace pour notre sécurité», avait déclaré le président de la chambre basse du Parlement russe, Viatcheslav Volodine. «Nous pensons que cela est inacceptable et conduit au déclenchement d’une troisième guerre mondiale à grande échelle, nucléaire, avec toutes les conséquences qui en découlent», avait-il ajouté.

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