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Niger : la situation se tend entre la France et les militaires putschistes

Au Niger, les militaires putschistes ont accusé la France de vouloir «intervenir militairement». Les pays d'Afrique de l'Ouest ont fixé un ultimatum d'une semaine aux militaires, affirmant ne pas exclure un «recours à la force».

Les militaires nigériens qui ont renversé le président élu Mohamed Bazoum ont accusé la France de vouloir «intervenir militairement» pour le rétablir dans ses fonctions, indique un communiqué lu ce 31 juillet à la télévision nationale.

Des soutiens des forces de sécurité et de défense nigériennes manifestaient ce 27 juillet à Niamey.

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«Dans sa ligne de conduite, allant dans le sens de la recherche des voies et moyens pour intervenir militairement au Niger, la France, avec la complicité de certains Nigériens, a tenu une réunion à l’état-major de la Garde nationale du Niger, pour obtenir des autorisations politiques et militaires nécessaires», affirme le communiqué.

Dans un autre communiqué, les putschistes accusent «les services de sécurité» d’une «chancellerie occidentale», sans préciser laquelle, d’avoir tiré la veille à Niamey du gaz lacrymogène sur des manifestants soutenant la junte, avec «pour conséquence six blessés, pris en charge par les hôpitaux» de la capitale.

Le 30 juillet, le président français Emmanuel Macron a menacé de répliquer «de manière immédiate et intraitable» à toute attaque contre les ressortissants de la France et ses intérêts au Niger, où des milliers de manifestants favorables au putsch militaire ont ciblé son ambassade à Niamey.

Certains ont voulu y entrer, avant d’être dispersés par des grenades lacrymogènes. Une plaque affichant «Ambassade de France au Niger» a été arrachée, avant d’être piétinée et remplacée par des drapeaux russes et nigériens, a constaté un journaliste de l’AFP.

Le Niger est un partenaire stratégique de la France, qui compte actuellement quelque 1 500 militaires dans ce pays clé dans la lutte antidjihadiste et fournissant par ailleurs 20% de l’uranium européen.

La Cedeao exige le «retour complet à l’ordre constitutionnel»

La pression s’accroît chaque jour un peu plus sur le nouvel homme fort proclamé du Niger, le général putschiste Abdourahamane Tiani, chef de la garde présidentielle, à l’origine de la chute de Mohamed Bazoum retenu par les putschistes depuis quatre jours.

La France a salué «les décisions prises par les chefs d’Etat» de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Ce bloc ouest-africain, l’Union africaine et les pays occidentaux, dont la France et les Etats-Unis, ne reconnaissent pas les «autorités» issues du putsch et demandent un retour à l’ordre constitutionnel.

Un sommet extraordinaire de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (dont le Niger est membre avec 14 autres pays) s’est tenu le 30 juillet à Abuja, sous l’égide du président du Nigeria, Bola Tinubu, à la tête de l’institution régionale depuis le début du mois.

La Cedeao a exigé «la libération immédiate» du président Bazoum et le «retour complet à l’ordre constitutionnel», selon les résolutions lues à la fin du sommet. Si ces demandes ne «sont pas satisfaites dans un délai d’une semaine», la Cedeao «prendra toutes les mesures nécessaires» et «ces mesures peuvent inclure l’usage de la force», selon ces résolutions.

Washington a fait part de son «indéfectible soutien» à Mohamed Bazoum, assurant que le coup d’Etat mettait en péril le «partenariat» entre les Etats-Unis et le Niger. «Nous nous joignons à la Cedeao et aux dirigeants de la région pour demander la libération immédiate du président Mohamed Bazoum et de sa famille et la restauration de toutes les fonctions de l’État au gouvernement légitime et démocratiquement élu», a déclaré le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken dans un communiqué.

L’organisation régionale a également décidé de «suspendre toutes les transactions commerciales et financières» entre ses Etats membres et le Niger, et de geler les avoirs des responsables militaires impliqués dans la tentative de coup. Le pays sahélien de 20 millions d’habitants est l’un des plus pauvres du monde, en dépit de ses ressources en uranium.

«Les sanctions feront très mal à notre pays», avertit le Premier ministre

«Il n’est plus temps pour nous d’envoyer des signaux d’alarme», a déclaré Bola Tinubu, «le temps est à l’action». «Les sanctions feront très mal à notre pays», a répété le Premier ministre nigérien Ouhoumoudou Mahamadou, dans un entretien accordé à la chaîne France 24 le 30 juillet. Il s’est dit «optimiste» sur les médiations en cours.

Le dirigeant du Tchad, Mahamat Idriss Déby Itno, dont le pays n’est pas membre de la Cedeao, mais qui est voisin du Niger, également puissance militaire au Sahel alliée de la France, a participé à ce sommet.

Il a ensuite passé quelques heures à Niamey, pour voir ce qu’il pouvait apporter au règlement de la crise, selon N’Djamena. Pendant sa médiation, il a échangé avec Mohamed Bazoum, dont il a publié une photo sur sa page Facebook, première image du président nigérien depuis le putsch. Assis à côté du président tchadien, Mohamed Bazoum apparaissait souriant.

Idriss Déby Itno s’est aussi «entretenu avec Abdourahamane Tiani et lui a transmis un message de la Cedeao», selon l’entourage de Mohamed Bazoum. L’ex-président du Niger Mahamadou Issoufou a également annoncé le 30 juillet qu’il s’employait à «trouver une sortie de crise négociée» pour faire «libérer» son successeur Mohamed Bazoum, et «le restaurer dans ses fonctions».

Le 29 juillet au soir, la junte issue du putsch avait dénoncé le sommet de la Cedeao, y voyant la menace d’une «intervention militaire imminente à Niamey en collaboration avec les pays africains non membres de l’organisation et certains pays occidentaux».

Des sanctions et ultimatums ont déjà été décidés par d’autres pays, notamment la France qui a annoncé le 29 juillet suspendre son aide au développement au Niger. Quant à l’Union africaine, elle a fixé la veille un ultimatum de 15 jours aux militaires pour rétablir «l’autorité constitutionnelle».

Situé en plein cœur du Sahel, le Niger est le dernier allié avec lequel la France, ancienne puissance coloniale, entretient un partenariat dit de «combat» contre les djihadistes, dans cette région minée par l’instabilité, la précarité et les attaques de groupes djihadistes.

Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger, miné par les attaques de groupes liés à l’Etat islamique et à Al-Qaïda, est le troisième pays de la région à subir un coup d’Etat depuis 2020.

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