D'après le chef des Républicains au palais du Luxembourg, les élus de droite n'auront guère à se forcer pour voter une réforme qu'ils appellent de leurs vœux depuis plusieurs années. Plusieurs figures du parti expriment cependant des réserves.
Le patron des sénateurs Les Républicains (LR), Bruno Retailleau, a estimé le 11 janvier, que la majorité avait présenté une réforme des retraites identique à celle voulue par le Sénat, dominé par la droite, tandis que plusieurs députés ont demandé des garanties sur les carrières longues.
«Ce n’est pas nous qui allons voter la réforme du gouvernement, c’est le gouvernement d’Elisabeth Borne qui va faire voter la réforme que nous proposons au Sénat depuis plusieurs années», s’est ainsi félicité sur France Inter le sénateur de Vendée, qui s’est incliné face à Eric Ciotti dans la course à la présidence du parti.
Selon lui, «sur les 62 députés [LR], une très grande majorité va le voter», à l’exception «peut-être d’une douzaine, [voire] une quinzaine» d’entre eux. «Je ne vois pas comment on peut ne pas voter une réforme qu’on a appelée de nos vœux depuis des années», a complété Bruno Retailleau, estimant que le texte présenté par Elisabeth Borne correspondait pour l’essentiel à «l’architecture» proposée par son camp.
Mi-novembre, la droite sénatoriale avait en effet ajouté un report de l’âge de la retraite à 64 ans à la loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, esquissant déjà les contours d’une majorité avec les macronistes sur ce dossier.
Les Républicains divisés sur le soutien à la réforme
Défenseur d’une «droite populaire», le député du Lot Aurélien Pradié a estimé sur Sud Radio que «tous ceux qui ont commencé à travailler avant 21 ans et en particulier à 20 ans vont être les grands perdants de cette réforme». D’après l’élu, qui s’était déjà prononcé contre le report de l’âge légal de départ, il faudrait pouvoir dire à ces derniers que «dès que vous aurez votre durée de cotisation nécessaire, 42 puis 43 ans dans le cadre de la réforme Touraine, vous pourrez partir à la retraite avant même l’âge légal», un point qu’il a érigé en «condition» à un éventuel vote favorable.
De la même manière, concernant les petites retraites, il faudrait selon lui «s’assurer que ceux qui sont déjà en retraite bénéficient aussi des 1 200 euros», en référence au montant minimum de la pension promis aux nouveaux retraités par le gouvernement. Selon lui, ce point de la réforme n’est «pas tout à fait clair». «Si ce n’est pas dans le texte, nous ne le voterons pas», a abondé le député du Nord Pierre-Henri Dumont sur RFI, selon qui il faudrait «éviter une brutalité de la réforme».
Une réforme de gens qui vont bien pour les gens qui vont bien
Pour le président des Hauts-de-France (ex-LR) Xavier Bertrand enfin, «la Première ministre doit faire évoluer son projet», critiquant sur BFM TV une «réforme de gens qui vont bien pour les gens qui vont bien» au caractère «profondément injuste». Il a plaidé pour que «celui qui a commencé à travailler tôt et a les 43 ans [de cotisation] puisse partir à taux plein avant ses 64 ans». En revanche, l’ex-rival de Valérie Pécresse à la primaire LR a souhaité que les régimes spéciaux «soient vraiment concernés» par la réforme. «La clause du grand-père c’est dans 43 ans, c’est pas possible», a-t-il ajouté, en référence à un point du projet présenté comme une concession aux bénéficiaires des régimes spéciaux par le gouvernement, puisque seuls les nouveaux entrants rejoindront le régime général.
Dans ce dossier central des retraites comme sur d’autres sujets, les Républicains sont tiraillés entre le soutien ponctuel à certaines réformes de la majorité macroniste et le souhait d’apparaître malgré tout comme un parti d’opposition. Après s’être ainsi dit en octobre «totalement opposé» à un accord avec le gouvernement que défendait l’ancien président Nicolas Sarkozy, le nouveau président du parti Eric Ciotti s’est dit le 8 janvier disposé à voter une «réforme juste» des retraites en estimant que cette position relevait «d’une question de cohérence et de responsabilité».
Réagissant aux affirmations lancées par le président du Rassemblement national Jordan Bardella, qui a estimé entre autres sur BFM TV que «les Républicains sont désormais membres de la majorité d’Emmanuel Macron», Bruno Retailleau a assuré que ce soutien à la réforme était synonyme de «courage», renvoyant aux «évolutions erratiques» et à la «démagogie» de la formation de Marine Le Pen sur les retraites.
A l’Assemblée, le patron des députés LR Olivier Marleix a salué le fait que «la Premier ministre a entendu un certain nombre de demandes», mais demande encore des «précisions» et des «avancées» avant de valider le vote du groupe, notamment sur la revalorisation des pensions pour les retraités actuels. Le ralliement du vote des députés LR permettrait d’éviter de recourir à l’article 49.3 de la Constitution, qui permet l’adoption d’un texte sans vote, comme l’a souligné le porte-parole du gouvernement Olivier Véran ce 11 janvier.
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