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Front ukrainien : la France n’est pas en guerre, la France est occupée

Après le Royaume-Uni et l’Allemagne, la France a conclu un accord de sécurité avec l’Ukraine, pour une durée de dix ans. La France n’est pas en guerre, elle est occupée : ses élites globalistes défendent des intérêts qui ne sont pas les siens. Par Karine Bechet-Golovko.

Le député communiste Fabien Roussel fait partie des élus qui ont voté contre le texte présentant un accord de sécurité entre Paris et Kiev.

L’Assemblée vote l’accord de sécurité entre Paris et Kiev, seule la gauche radicale s’y oppose

Sans consulter le peuple, sans consulter les élus de ce peuple, Macron a conclu mi-février avec Zelensky un accord bilatéral dit de sécurité, appellation pudique cachant mal la coopération militaire, sans limites fixées par le document, entre la France et l’Ukraine, qui est un pays en guerre.

Le 12 mars, le gouvernement a tenté de compenser le défaut de légalité par un sursaut de légitimité, en organisant une parodie démocratique à l’Assemblée nationale. Au cri des nazis ukrainiens de la Seconde Guerre mondiale, Slava Ukraini, devant l’ambassadeur d’Ukraine présent dans l’hémicycle, Gabriel Attal a appelé les députés… à ne pas laisser la Russie gagner la guerre. À ce rythme-là, la France va finir par entrer en guerre à l’insu de son plein gré…

Après la Grande-Bretagne et dans la foulée de l’Allemagne, la France a conclu un accord de sécurité avec l’Ukraine, pour une durée de dix ans. Cet accord sert tout d’abord à donner une base légale à l’implication de ces pays dans la guerre en Ukraine, en fixant ce qui existe déjà, à savoir la formation des militaires ukrainiens, la fourniture d’armement, le partage du renseignement, etc.

Ce qui est plus inquiétant est qu’il prévoit une aide, dont il est précisé qu’elle n’a pas de limites, en cas d’agression future de la Russie, alors que la Russie est déjà posée par le document comme pays agresseur. Et le tout est couronné par une aide financière budgétaire de 3 milliards pour l’année 2024 en cours.

L’accord n’a pas été ratifié, même s’il engage les finances de la France

Processuellement, il est extrêmement surprenant qu’un tel document n’ait pas été ratifié par le Parlement, dans le cadre de l’article 53 de la Constitution, puisqu’il engage les finances de la France. Et comme on peut le lire sur le site de l’Assemblée nationale : «Le Conseil d’État veille notamment à ce que tout accord portant sur des matières de nature législative ou ayant une incidence financière fasse l’objet d’un projet de loi autorisant sa ratification.» En effet, selon la pratique établie depuis 2011, le Conseil d’État estime  «qu’un accord n’a pas à être soumis au Parlement dès lors qu’il ne comporte “aucun engagement excédant par leur montant limité et par leur nature les dépenses liées au fonctionnement courant incombant normalement aux administrations dans le cadre de leurs compétences habituelles”.»

Or, cet accord n’est pas anodin. Au-delà des 3 milliards déjà cité, le flou sur l’engagement de la France dans ce conflit peut entraîner les finances publiques dans des abysses inconnus. L’absence de limites est stipulé dans plusieurs dispositions, notamment ici : «Les participants travailleront ensemble à la mise en place d’une force durable capable de défendre l’Ukraine aujourd’hui et de dissuader l’agression russe à l’avenir, grâce à la fourniture continue d’une assistance en matière de sécurité et d’équipements militaires modernes dans les domaines terrestre, aérien, maritime, spatial et cybernétique, en accordant la priorité, sans s’y limiter, à la défense aérienne, à l’artillerie, à la capacité de frappe de longue portée, aux véhicules blindés, aux capacités de l’armée de l’air et à d’autres capacités essentielles.»

Le pouvoir français, héraut de la guerre atlantiste conduite en Ukraine contre la Russie

Nous sommes donc bien loin des dépenses courantes dispensant le gouvernement de soumettre l’accord à un vote du Parlement. Cet avis est également celui de quelques personnalités politiques françaises, qui restent dans une vision traditionnelle de l’État et de la souveraineté. Ainsi, le sénateur Alain Houpert et le député Nicolas Dupont-Aignan ont déposé un recours en référé au Conseil d’État, afin de contester la validité de l’accord ainsi signé uniquement par le président Macron. Ce référé a en réalité bien peu de chances d’aboutir, non pas en raison de la position juridique du juge administratif suprême, mais parce que le Conseil d’État n’ira pas à la confrontation directe avec l’exécutif, alors que le pouvoir français est aujourd’hui le héraut de la guerre atlantiste conduite en Ukraine contre la Russie.

Jordan Bardella lors d'un meeting des élections européennes. Tête de liste et président du Rassemblement national, il a annoncé que son parti s'abstiendrait lors du vote sur le plan de soutien de la France à l’Ukraine.

Jordan Bardella refuse de soutenir le plan de soutien à l’Ukraine… mais s’abstiendra

Mais pour donner un voile démocratique et rassurer le bon peuple, qui s’inquiète un peu de devoir un jour aller prendre les armes, sans savoir pour qui, sans savoir pour quoi, le trio de choc Attal-Séjourné-Lecornu est allé faire le show devant des députés, on ne peut plus dociles. Pour autant, le discours du gouvernement, suivi d’un vote, n’allait avoir strictement aucun impact sur la validité de l’accord déjà conclu avec l’Ukraine, puisque le spectacle a été organisé dans le cadre de l’art. 50-1 de la Constitution, qui prévoit une déclaration du gouvernement, des débats et un vote sans incidence – sur rien. Il ne s’est pas agi de l’art. 53 de la Constitution, qui prévoit la procédure d’adoption par le Parlement des accords internationaux de la France.

Même dans cette mise en scène au rabais, les «oppositions» se sont faites toutes petites. Avant le début du premier acte, le Rassemblement national annonçait courageusement ne pas voter. L’abstention devient leur ligne d’effacement politique, une faiblesse telle qu’ils en deviennent la cible privilégiée des va-t-en-guerre. Les communistes et La France insoumise ont annoncé voter contre, mais en prenant bien soin de souligner que la Russie est l’agresseur, qu’ils soutiennent l’Ukraine, mais ne veulent pas prendre le risque que la France se retrouve par hasard en guerre contre la Russie en raison de ce traité. Quelle belle unité dans la soumission atlantiste, quel spectacle !

Et le discours du Premier ministre était à la hauteur des attentes : la Russie ne doit pas gagner (enfin, l’OTAN ne peut pas perdre), nous devons soutenir les Ukrainiens (enfin, ceux qui ont pu survivre à ce jour à la mobilisation forcée), la Russie ne doit pas récupérer les céréales ukrainiennes (actuellement avantageusement gérées par les multinationales), la Russie est déjà responsable de la hausse des prix de l’énergie et de l’alimentaire (mais non, ce ne sont pas les sanctions européennes, enfin, voyons), etc.

Les élites françaises ne font que défendre les intérêts globalistes

Pour enfoncer le clou, puisque les Français ne comprennent pas très bien ce qu’ils devraient aller faire sur le front ukrainien, le territoire français en étant assez éloigné… Attal de déclamer : «La Russie est une menace non seulement pour l’Ukraine, mais aussi directement pour nous, pour l’Europe, pour la France, pour le peuple français.» Et pour que les choses soient claires, le Premier ministre d’ajouter : «Le régime russe est un régime autoritaire, déterminé à combattre nos valeurs et nos intérêts sur le terrain en Ukraine.» Quels sont les intérêts directs de la France en Ukraine, personne ne l’a précisé. Les élites françaises ne font qu’y défendre les intérêts globalistes. En quoi la Russie serait une menace pour la France ? Cela aussi reste une énigme. En revanche, pour les valeurs, les choses sont devenues très claires à la fin du discours du Premier ministre, lorsque celui-ci a conclu par Slava Ukraini.

Ouvrons les yeux : la France n’est pas en guerre, la France est occupée. Ses élites défendent des intérêts, qui n’ont rien à voir avec les nôtres. Elles sont prêtes à faire disparaître la France, pour que la globalisation ne périsse pas en Ukraine.

Les valeurs que ce gouvernement défend sont celles des années 30. Attal n’est pas le seul politicien en Occident à reprendre avec enthousiasme ce cri nazi. Oui, nazi. Comme l’expliquait la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères au sujet de l’origine de cette interpellation Slava Ukraini, qui littéralement signifie Gloire à l’Ukraine comme l’a rappelé la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova : «L’interpellation “Gloire à l’Ukraine !” a été créé comme slogan de salutation en 1939 par les nationalistes ukrainiens. Plus tard, un geste y a été ajouté sous la forme d’un lever de la main droite tendue et du cri de réponse “Gloire aux héros !”. Avec ce slogan, les Banderistes saluaient les unités de la Wehrmacht, lorsque les nazis allemands entraient dans les territoires occupés.»

Une odeur nauséabonde se répand sur nos terres d’Europe. Une odeur rance, forte, qui prend à la gorge. Une odeur lourde. Lourdes des guerres passées. Lourde du fanatisme passé. Lourde des guerres à venir. Lourde du sang. Des larmes. Des cris. Une odeur, qui rampe et s’insinue partout. Dans nos institutions. Dans nos maisons. Dans nos esprits. Dans nos âmes. Si nous les laissons faire. Ouvrons les yeux : la France n’est pas en guerre, la France est occupée. Ces élites défendent des intérêts qui n’ont rien à voir avec les nôtres. Elles sont prêtes à faire disparaître la France, pour que la globalisation ne périsse pas en Ukraine.

 

 

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